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la prééminence du siège de Pierre et aucunement son ingérence ; on laissera entendre qu’on voit avec plaisir le droit électoral rendu aux clercs et la distribution des bénéfices restituée aux collateurs ordinaires. Au fond, on voit bien que de ces élections ne sortent qu’anarchie, violence, procès, conflits, et que si le Roi veut, — ce à quoi jamais il ne renonce, — placer ses protégés à Rouen, à Reims, à Orléans, à Lyon, à Poitiers, il lui faudra sans cesse négocier avec des chanoines récalcitrans ou d’incommodes métropolitains. Le mieux serait assurément d’amener Rome à un accord, d’autant que sans cesse on a besoin de Rome pour les affaires d’Italie. Mais Rome ne se montre point en 1438, en 1444, en 1445, ni même en 1472 disposée à céder assez. Alors on redressera sans cesse l’épouvantail de Bourges ; on réunira des assemblées d’évêques sous Charles VII ; on se fera faire des réprimandes par le Parlement sous Louis XI ; on fera manifester les États généraux sous Charles VIII ; on braquera sous Louis XII contre Rome la lourde artillerie des canonistes à la Sorbonne et l’artillerie plus légère des pamphlétaires et des satiristes ; enfin, dans les premiers mois du règne de François Ier, on affectera pour la vieille Pragmatique, au fond condamnée, une tendresse qui soudain s’évanouira à Bologne. Il faut, l’ordonnance de Bourges en main, faire une si grande peur au Pape, lui créer tant de soucis et de si constans, lui persuader si bien que tout serait préférable à cette menace de schisme, qu’enfin le Pape cédera. Il faut que le jour où la Pragmatique sera retirée, le Roi ait obtenu ce qu’au lendemain même, — peut-être à la veille, — de l’Assemblée de Bourges, il avait désiré : la libre disposition, consentie par Rome, des bénéfices de son royaume. Il fallut soixante-dix-huit ans d’une inlassable diplomatie pour préparer l’œuvre de Bologne dont Bourges avait, sans qu’on s’en doutât, fourni l’instrument.

Pour qui a étudié, au terme de cette histoire, les négociations de Bologne dans leur détail, le dessein ne paraît guère douteux : je me suis, il y a quelques années, permis de l’affirmer[1]. J’ai eu plaisir à constater que le jeune historien

  1. Il est toujours fort indiscret de renvoyer le lecteur à un ouvrage qu’on a signé : quand cet ouvrage est une thèse latine, l’indiscrétion dépasse toutes les bornes. Ce n’est donc que pour mémoire que je rappelle ici la modeste contribution que j’ai apportée à l’histoire du Concordat de 1510 : De Conventu Bononiensi (De l’entrevue de Bologne), publiée chez Plon, 1901. J’y ai exposé les négociations du Concordat et défini à cette occasion la politique religieuse de François Ier dont on connaîtra par la suite quelques traits.