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aux gouvernemens protestans du Sud que du jour où l’Autriche « ultramontaine » les importunerait, la chancellerie de Berlin, approvisionnée de bonnes ripostes, aurait assez d’énergie pour faire contrepoids.

Il était naturel qu’à son tour la catholique Bavière fût visée par l’action confessionnelle de la Prusse. Les méthodes ici furent autres, parce que les circonstances étaient autres, et la Prusse, à Munich, au moins durant cette période, recourut moins à des diplomates qu’à des professeurs.

De 1837 à 1847, l’État bavarois s’était présenté comme le boulevard du « romanisme » allemand. Munich était un centre de pensée catholique où l’Allemagne venait s’instruire, un centre de politique catholique, qui surveillait la Prusse et que la Prusse redoutait ; et la Bavière, sous le ministère Abel, semblait aspirer à couvrir d’une sorte de protectorat, d’un bout à l’autre de l’Allemagne, tous les catholiques qui dénonçaient une oppression. Lorsqu’on juin 1850 le nouveau roi Max, s’en allant pour une cure aux bains d’Aix-la-Chapelle, fit halte à Cologne, il vit longuement l’archevêque Geissel, qui toute sa vie eut la confiance des Wittelsbach, et il lui affirma son intention de « tenir bien haut le drapeau de l’Église. » La promesse fut vite oubliée. Dans son ensemble, le règne de Max fut marqué par une réaction complète contre les influences et contre les maximes qu’avait mises en honneur son père Louis Ier. Un incident, même, en l’année 1855, éclaira d’une lumière singulièrement crue le contraste entre les deux souverains. Ringseis et Bluntschli, l’un catholique bavarois, l’autre immigré protestant, polémiquaient entre eux ; toute l’Université de Munich écoutait et regardait. On vit le vieux roi Louis, publiquement, prendre parti pour Ringseis, et le roi Max, tout au contraire, se ranger du côté de Bluntschli. « Il m’a l’air d’un Saxon plutôt que d’un Wittelsbach authentique, » disait un jour Louis Ier de son jeune successeur, et, de fait, celui-ci parut prendre pour tâche d’asseoir en Bavière l’hégémonie intellectuelle de l’Allemagne du Nord.

Entre son accablement à Olmütz et son triomphe à Sadowa, la Prusse gagna sur l’Autriche, progressivement, insensiblement, sourdement, une première victoire, d’abord inaperçue des états-majors et même de beaucoup de diplomates : cette victoire gagnée sur les bords de l’Isar fut la conquête morale, non point du peuple bavarois, mais de l’intelligence bavaroise, et la formation