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vous les trouverez dans l’histoire humaine comme dans l’histoire naturelle.

Mon ambition est de saisir ceux de la France contemporaine ; j’ai tâché de les dégager dans l’Ancien Régime, je tâche de les suivre dans la Révolution, et je tâcherai de les mettre en lumière dans le Régime nouveau, en tenant compte des grandes influences qui viennent se surajouter à eux pour retarder ou accélérer leur effet. Ces influences, par exemple, sont après 1815 les applications des sciences physiques, le discrédit de l’esprit classique en littérature, la rénovation de toutes les sciences morales par la méthode expérimentale, l’exemple et l’ascendant des États réformés sur un autre type que le Contrat social, etc. En histoire, comme dans toute autre science, il me semble qu’il faut dégager, définir, mesurer autant que possible les grandes forces agissantes et permanentes, puis ajouter l’étude des données plus ou moins accidentelles et perturbatrices. Par ce procédé seulement, on pourra déterminer l’effet total et final, et prévoir jusqu’à un certain point les grandes lignes de l’avenir. Sans doute, il y a des chances d’omission et de fausse mesure ; mais dans un demi-siècle, les historiens instruits par les faits pourront rectifier nos erreurs et suppléer à nos omissions. Vous autres, jeunes gens, vous ferez ce travail. Laissez-moi vous dire que là est notre meilleure espérance.

L’histoire commence à peine à devenir une science ; nous n’en posons que les premières bases, c’est aux hommes de votre âge à construire le bâtiment.

Croyez-moi, je vous prie, votre très obligé et très dévoué serviteur.


À Monsieur Armand Lods[1].


Menthon-Saint-Bernard, 4 décembre 1881.
Monsieur,

Je vous suis très obligé de vos renseignemens et de vos offres, mais je me ferais quelque scrupule de vous donner la peine de transcrire une délibération entière comme celle de la Commune d’Héricourt. Cependant, si vous avez la bonté de m’en

  1. M. Armand Lods, publiciste, né à Héricourt (Haute-Saône), en 1854.