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certitude. Cependant, certains auteurs pensent qu’il fut taillé, peut-être, vers 131, au moment de la visite de l’empereur Hadrien. Il mesure une vingtaine de mètres de hauteur. Les Bédouins lui donnent le nom de « El Khazné Fir’aoun, » et pensent qu’un trésor pharaonnique est enfermé dans l’urne, mais il n’y a aucune importance à attacher à cette dénomination, ni au prétendu trésor, car les Arabes actuels sont de pauvres historiens et d’excellens conteurs de légendes. Son état de conservation est parfait, sauf pour une colonne du premier étage, tombée aujourd’hui, et les personnages dont les visages sont assez effacés.

Autrefois, un parvis dallé recouvrait la place. De ce parvis, il ne reste rien. Les pluies torrentielles ont emporté la maçonnerie ; des lauriers-roses poussent maintenant, pressés les uns contre les autres, et tous les ans, l’été, le temple désert semble émerger des fleurs, dans le silence religieux de la gorge abandonnée.


En quittant le Khazné Fir’aoun, et en continuant sa route vers l’Est dans la direction du village d’Elji, pendant une heure environ on chemine dans le Sik...

Autrefois, un pavage recouvrait le sol : l’eau, soigneusement canalisée, était, par là, amenée à Pétra dans des conduits et des travaux dont les vestiges sont encore visibles. Aujourd’hui, elle coule claire, limpide sur le sable jaune, elle chante sur le gravier rose et donne une délicieuse impression de fraîcheur que, seuls, les chameaux ne goûtent pas.

Habitués à marcher sur un sol complètement desséché, ils font mille difficultés pour avancer, refusent de se mouiller les pieds, essaient gauchement d’enjamber, heurtent les charges contre les parois du rocher, glissent et, finalement, découragés, tombent.

Elle est grandiose aussi, cette coulée du Sik. Les grès rouges, noircis par l’humidité, s’enlèvent d’un seul jet à 60 ou 300 mètres de hauteur. En quelques places, elle est si étroite qu’en étendant les bras, on en touche à peu près les deux bords. Le soleil n’y pénètre pour ainsi dire jamais, ou dans certains endroits, pendant peu de minutes seulement, de sorte que la marche s’effectue dans une demi-obscurité, cette demi-obscurité si particulière du plein jour.