elle a été submergée par le flot ottoman ? Les Slaves de Macédoine sont donc des Serbes : leur langue se rapproche du serbe autant et plus que du bulgare. Si un certain nombre d’entre eux se sont ralliés à l’exarchat, c’est qu’ils espéraient trouver dans la Bulgarie l’instrument de leur délivrance ou bien qu’ils redoutaient la vengeance des bandes ; mais ils seraient devenus et ils deviendraient encore, s’ils croyaient y trouver un avantage, tout aussi volontiers Serbes que Bulgares.
Personne ne conteste, disent d’autres Serbes plus modérés dans leurs revendications, qu’au-delà des puissantes assises du Char-Dagh, dans le pays qui porte encore le nom de Vieille-Serbie, toute la population chrétienne ne soit serbe. Nulle part la situation des chrétiens n’est plus précaire et plus misérable que dans les sandjaks d’Ipek, de Prizrend, de Pristina. Environ 400 000 chrétiens serbes y soutiennent, contre 600 000 Albanais mahométans, une lutte de tous les jours où les chrétiens ne sont pas les plus forts. Autorisés, en qualité de musulmans, à porter un fusil, sûrs de l’impunité que leur assure la confiance du Sultan, les Albanais traitent le paysan chrétien comme un esclave, souvent même comme un gibier. Les « réformes » n’ont jamais pénétré jusque dans ces montagnes ; le fonctionnaire turc n’y est pas obéi, et, sur cette terre qui a été le centre de l’empire de Douchan, les malheureux Serbes sont réduits, pour se défendre, à vivre groupés en zadrouga, — sortes de clans ou de communautés de famille dont Le Play a étudié la constitution. — Les paysans, pour échapper au destin de leurs frères, s’enfuient dans le royaume, ou bien ils se font musulmans et se transforment en Albanais : d’opprimés, ils deviennent oppresseurs. On calcule que sur 600 000 Albanais du vilayet de Kossovo, 200 000 sont des Serbes albanisés. Si un prompt remède n’est pas apporté à cette situation tragique, l’élément chrétien en Vieille-Serbie aura bientôt disparu.
Au Sud du Char, les Bulgares, sur leur cartes ethnographiques et dans leurs statistiques, suppriment totalement l’élément serbe et font, de tous les Slaves patriarchistes, des Bulgares non encore déclarés. Cependant, les Serbes sont nombreux dans le sandjak d’Uskub ; dans la ville même, ils sont cent cinquante familles. Ils y ont un évêque et des écoles ; on trouve des villages serbes dans tout le Nord du vilayet et même jusqu’aux environs de Vêles. Dans le vilayet de Monastir, d’après le dernier