Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 39.djvu/876

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cette rédaction est d’un élève des écoles ; mais l’urne du peuple n’aime pas moins à plaire, autant par galanterie que par flatterie : on le voit dans ces si curieuses affiches, toutes marquées de l’esprit populaire, fantaisiste, pittoresque, alangui et mélodique, qu’il compose pour appeler le plus de gens aux concerts du dimanche. En vers libres et farcis, familièrement symboliques et cajoleurs, ils célèbrent le bonheur et la civilisation en manière d’actualité afin d’attirer le public à leurs fêtes du jour en en signalant le cachet nouveau.


Réjouissez-vous, — vous tous qui vivez, c’est l’époque de l’allégresse. Réjouissez-vous : les ténèbres sont parties, la route est éclairée, les grands comme les petits ont chacun leur part au bonheur : ceux qui possèdent ne craignent plus d’être volés, les malheureux ne sont point oubliés, les orphelins sont soignés, et les pères, les mères travaillent avec joie à augmenter le nombre du leur progéniture… Marchons ensemble, et voici le chant que nous ferons en marchant : Louons, louons la bonne mère la France qui ne nous abandonnera jamais. Réjouissons-nous, car c’est notre chère mère, acclamons et remuez vos pieds pour marcher ensemble.


Ce sont des Te Deum de peuples sceptiques mais artistes à la France. Ces paroles déclamatoires ou musicales de fêtes s’insinuent dans les âmes langoureuses des races zézayantes. Lorsque la routine de la répression, l’injustice, les exactions n’entretiennent point une sourde rébellion dans les peuples soumis, les races supérieures se les assimilent en leur ensemble, laissant, par un échange fatal, leurs représentais en ces pays chauds s’assimiler eux-mêmes individuellement à la race indigène, ce qui n’a guère d’importance, puisque d’autres Européens les remplaceront. Ce n’est point par la participation prématurée, à l’administration, mais, en une sorte de connivence humanitaire, par l’adoucissement joyeux des mœurs qu’on francise un peuple.


MARIUS-ARY LEBLOND.