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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/576

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enquêtes, les criées et les encans ; les tabellions enfin y réunissaient les parties pour la rédaction des contrats : « Fait et stipulé à Saint-Etienne, sous le poêle de la maison Mandrin, » lit-on dans les formules des actes.

Au commencement du XVIIe siècle, l’immeuble subit une modification importante. La fontaine publique de Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs fluait sous le poêle de la maison Mandrin, à l’entrée de la voûte en arceau qui s’ouvrait sur le chemin de la porte Neuve. On vient de dire que ce poêle, terrain communal, servait de place publique. Or la fontaine vint à tarir, tandis que l’eau était toujours claire et profonde dans le puits qui se trouvait au milieu de la basse-cour des Mandrin. La commune proposa à ces derniers de leur accorder, en échange de leur puits, la jouissance d’une partie du poêle. Les intéressés acceptèrent, cédèrent leur puits et se construisirent, sur le terrain du poêle, c’est-à-dire sous leur maison, un magasin, flanqué d’une chambre d’habitation, à l’angle de la façade nord du préau, qui fut bouché de la sorte sur cette partie.

La boutique des Mandrin s’ouvrait donc par une porte de bois de sapin, aux jambages de chêne « très vieux, » sur le préau, qui servait de place publique aux habitans de Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs. Cette porte était garnie de gonds et de barres, mais elle n’avait pas de serrure. Elle fermait à l’intérieur par « un verrouil. » Au-dessus de la porte, une fenêtre gisante, garnie de trois barres de fer qui étaient attachées à une poutre enchâssée dans la muraille. Le sol de la pièce était de terre battue, de « terre grasse. » Par l’usage il s’y était fait des trous en plusieurs endroits. Le plafond en était soutenu par onze poutrelles saillantes. Là se débitaient toutes sortes de marchandises, mercerie et quincaillerie, outils de labour, houes, crocs et hoyaux ; des étoffes, de menus bijoux d’or et d’argent pour les fiancés de village, des affiquets rustiques et des rubans aux vives couleurs pour les coiffes des paysannes. C’était en même temps un comptoir de marchand de vin, comme l’indique un procès-verbal de levée de corps, où se trouve notée la triste fin d’un habitant de Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs, qui avait tant bu d’eau-de-vie « es boutique de François Mandrin, » qu’il en était tombé ivre-mort au pas de la porte, pour ne plus se relever.

L’histoire du petit magasin, sous les poêles de Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs, a son importance au début de ce récit. Le jeune