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fatigues et qu’elle se trouvoit incommodée[1]. » A défaut de ces deux princesses, le Roi désigna la princesse de Condé. De même le duc du Maine fut désigné, à défaut du duc de Berry, que son extrême douleur fit dispenser de toutes les cérémonies funèbres, et du duc d’Orléans qui fut réservé pour les cérémonies de Saint-Denis. Peut-être le Roi ne fut-il pas fâché de cette nouvelle occasion qui lui était offerte de faire tenir par un de ses bâtards un rôle qui aurait dû revenir à un prince du sang. Ces diverses désignations faites, il travailla, comme à son ordinaire, avec le Père Le Tellier, et, l’après-dînée, se promena dans les jardins de Marly.

Les deux cœurs furent mis dans un carrosse dont les huit chevaux étaient bardés de housses noires traînant jusqu’à terre avec de grandes croix de moire d’argent blanche. L’évêque de Senlis en rochet et camail, la princesse de Condé, le duc du Maine, la duchesse de Vendôme, Mlle de Conti et la duchesse du Lude y montèrent, et le carrosse partit du pied du grand escalier, les tambours des gardes françaises et suisses battant « d’une manière lugubre. » Le carrosse était suivi de plusieurs autres, où prirent place les menins du Dauphin, et les officiers de la maison de la Dauphine. Une infinité de flambeaux de cire blanche portés par des gardes du corps à cheval, des pages et des valets de pied éclairaient la marche. Parti à six heures et demie, le cortège n’arriva qu’à minuit au Val-de-Grâce. L’abbesse fit, en recevant les cœurs, un très touchant discours. Le cortège ne repartit du Val-de-Grâce qu’à deux heures du matin. Les princesses, fatiguées, couchèrent à Paris.

Cependant, à Versailles, on préparait tout pour les cérémonies qui devaient précéder la levée des corps. Les deux grilles du palais étaient tendues de noir, sans écusson. Toutes les marches du vestibule, le grand escalier, la première salle des gardes et tout l’appartement de la Dauphine étaient également tendus de noir jusqu’au plafond. Deux bandes d’écussons régnaient depuis la cour jusqu’à l’appartement où les deux cercueils étaient exposés.

Les deux corps furent gardés pendant trois jours à partir du samedi 20, à droite par les menins du Dauphin, à gauche par les dames du palais de la Dauphine et par quatre évêques, deux

  1. Sourches, t. XIII, p. 297.