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ment de se réveiller en sifflant, et il s’est mis, dans cette intention, à faire des lois les unes sur les autres. Celle dont il s’agit actuellement a pour objet d’assurer la dévolution aux communes dans les meilleures conditions pour celles-ci. Il n’y a qu’un malheur, c’est que sa loi prive les tiers, qui sont dans l’espèce les héritiers des donateurs, des garanties que le droit commun leur assurait, soit pour la reprise des biens, soit pour l’exécution des conditions sous lesquelles ils avaient été donnés ou légués aux fabriques.

Déjà la loi de séparation avait décidé que les héritiers en ligne directe des donateurs pourraient seuls intenter une action en reprise des biens. Il y avait là une première et regrettable atteinte au droit commun ; pourquoi les héritiers en ligne directe avaient-ils le droit de revendiquer les biens en cause, à l’exclusion des collatéraux ? La seule raison est qu’on avait voulu ôter une vipère du nid avant de le remettre aux communes. Il restait pourtant un droit aux collatéraux ou aux légataires universels, celui de poursuivre la révocation d’une donation dont les causes ne seraient pas exécutées : la loi de 1905 n’avait pas, en ce qui les concerne, poussé la spoliation jusqu’au bout. Quant à la question de savoir si les communes attributaires des biens les recevraient avec toutes les charges qui y étaient afférentes, c’est-à-dire avec l’obligation de remplir toutes les conditions mises à la donation ou au legs primitif, elle semblait bien ne soulever aucun doute. « Nous sommes d’honnêtes gens, » avait dit M. le ministre des Cultes : la Chambre et le Sénat s’étaient contentés de cette assurance. Interrogé d’une manière plus expresse et plus pressante sur ce qui arriverait dans certains cas déterminés, M. Briand avait répondu que les tribunaux en décideraient : nous avons un Code civil, les tribunaux rappliqueraient. Si tout n’était pas pour le mieux dans ces déclarations du ministre, tout du moins était clair. Une action en reprise des biens ne pouvait être exercée que par les héritiers directs ; une action en révocation pour non-exécution des charges pouvait être exercée aussi par les collatéraux ou par les légataires universels ; et, dans tous les cas, les tribunaux créeraient une jurisprudence conformément aux principes généraux du droit.

La loi nouvelle a pour but principal de priver les collatéraux du droit qui, au moins dans un cas, leur avait été reconnu jusqu’ici. Si elle est votée, le nid attribué aux communes sera sans doute vidé d’un certain nombre de vipères ; mais le droit commun sera violé une fois de plus, et dans des conditions particulièrement révoltantes. On se demandera ce qu’il faudra désormais entendre par le mot de