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Min, raconte-t-on, ceux qui pénétrèrent dans la chambre mortuaire virent un arbuste verdoyant marquer la place où, pour la patrie, le dernier soupir fut rendu. Ce patriote, de manières charmantes, était coutumier d’une hospitalité magnifique. À ce titre, il exprimait une des vertus les plus précieuses de ce pays, où la réception des étrangers, chez le plus pauvre des paysans, passe pour le premier des devoirs. La porte des pauvres comme celle des riches est toujours ouverte au passant, chacun tirant fierté du nombre de ses hôtes, avant du reste un absolu besoin de recevoir et de converser. Entre ces gens réunis souvent pour la première fois, les questions du jour sont librement discutées, les plus puissans personnages critiqués ou loués avec un abandon parfait. Pour sa piété filiale, pour sa cordiale hospitalité, le peuple coréen, si difficile à bien comprendre, mérite qu’on lui passe bien des défaillances.


XI. — LES CORÉENS : LA RACE, LES APTITUDES INTELLECTUELLES


Le peuple coréen présente des traits tout à fait contradictoires. J’ai rencontré chez lui des hommes de valeur, j’ai souvent recueilli des preuves d’une intelligence très développée ; il m’a été donné d’enregistrer des actes témoignant d’un véritable héroïsme. D’autre part, l’indolence et l’inaction générale m’ont stupéfait. Faut-il adopter l’opinion de ceux qui ne veulent voir en Corée qu’une race déchue et imbécile ? Quel jugement d’ensemble à porter ?

Au point de vue de la race, on distingue en Corée deux types distincts. Les habitans des régions septentrionales et des rives du Yalou sont très différens, même pour l’observateur superficiel, de ceux des côtes Sud. Les uns se rapprochent des Mandchous, les autres des insulaires de l’Est. Les uns, cédant à un grand mouvement de migration, sont venus du continent ; les autres, navigateurs, sont issus de la Malaisie.

En général, le Coréen a les traits plus réguliers que le voisin nippon. D’une stature plus haute, surtout dans le Nord, il est robuste et jouit d’une forte santé. Au point de vue moral, il se distingue par son goût pour les spéculations de l’intelligence, par son dédain ou sa paresse lorsqu’il faut agir physiquement. Partout se marque, chez le Coréen, cette tournure abstraite des idées, cette recherche du plaisir dans la théorie et non dans la pratique.