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une avance totale de 100 000 francs destinée à l’entretien des troupes. » Pour avoir les 80 000 francs formant le solde de cette somme, il faut une dépêche de notre ministre des Affaires étrangères, M. Pichon, et la « garantie personnelle » des délégués chérifiens. En exerçant une pression sur la Banque d’Etat, on obtient pour le Makhzen une avance de 1 million « en deux termes, savoir : 500 000 francs à Fez pour les préparatifs de départ (du Sultan) et 500 000 francs pour les dépenses de la Cour et l’action à exercer sur les tribus. »

Quand on alloue, d’ailleurs, de plus fortes sommes, elles fondent rapidement sans laisser de traces : ainsi M. Gaillard, notre consul à Fez, signale « la misère dans laquelle se trouvent à Fez les petits fonctionnaires et les soldats qui n’ont pas été payés depuis plusieurs semaines. Les 2 millions que le Sultan avait mis, le mois dernier, à la disposition du cheik El Tazzi, afin de pourvoir aux besoins les plus pressans du Makhzen, sont dépensés, et la détresse financière est extrême. » On sait que, tout récemment, le gouvernement français a obtenu que l’une ou plusieurs de nos banques avançassent au Makhzen une somme de 1 500 000 francs à 2 millions. On connaît aussi le mécompte qu’éprouva le Sultan dans le prêt qu’il sollicitait en Europe sur le gage de ses diamans et bijoux dont la valeur fut estimée par les prêteurs éventuels fort au-dessous de celle qu’il leur attribuait.

Cette pénurie du Makhzen ne se comprend que trop, et elle n’est pas près de disparaître. Dans l’état d’anarchie présente où le pays est tiraillé par quatre compétiteurs, le sultan Abd-El-Azis, le sultan prétendant, Mouley-Hafid, le rogui et Raïssouli, l’impôt intérieur ne rentre pas ; les tribus un peu fortes profitent de cette division du pouvoir et de son affaiblissement pour ne rien payer. Le plus clair des revenus, c’était celui des douanes ; mais il est pour longtemps hypothéqué à la dette contractée depuis 1904, ou bien il est affecté aux frais de la police des ports.

La dette publique du Maroc est relativement assez considérable : on trouve d’abord l’emprunt français de 62 millions de francs émis en 1904 et formellement gagé par les douanes ; puis, un emprunt mi-allemand, mi-français, d’une douzaine de millions, ensemble 74 millions en chiffres ronds exigeant pour l’intérêt et l’amortissement environ 4 millions. Il est prévu que le corps de police des ports, dont l’entretien doit être pourvu par les recettes