Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/715

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un moment de côté ce qui divise les républicains, et même les autres.. Les amis de M. Brisson avaient voulu fêter sa quinzième élection à la présidence de la Chambre des députés. Les fêtes de ce genre comportent inévitablement un banquet et des discours. M. Combes y a été invité et y a pris la parole. On peut n’être pas d’accord avec M. Brisson en politique, et tel a été bien souvent notre cas. Lorsqu’on a donné à sa candidature à la présidence un caractère politique, nous avons dû lui en opposer une autre. Mais la vérité nous oblige à reconnaître, et nous le faisons volontiers, que M. Brisson est professionnellement un bon président : il apporte dans une tâche difficile du tact, de la dignité, de l’autorité, de l’impartialité. Aussi la manifestation de ses amis à propos du quinzième anniversaire de son élection ne pouvait-elle déplaire à personne, à la condition de garder le caractère que M. Brisson lui-même avait toujours montré sur son fauteuil présidentiel. Peut-être en aurait-il été ainsi sans M. Combes ; mais M. Combes était là, et il n’a pas manqué d’en profiter pour prononcer un certain nombre d’excommunications.

Voici le passage le plus significatif de son discours. — « J’ai déjà dit, en conseiller désintéressé de mon parti, parlant et agissant en toute occasion sous l’empire dominant de la reconnaissance sans borne que je lui dois pour l’appui continu qu’il m’a donné dans l’accomplissement des réformes les plus considérables, oui, mes amis, j’ai dit, mais je tiens à redire que la raison des choses, non moins que l’intérêt supérieur de la République, exige la formation de deux partis bien tranchés au sein de la représentation nationale, à l’imitation de ce qui existe dans le corps électoral : le parti des républicains avancés, des républicains de gauche, et le parti des républicains progressistes ou libéraux, qui ont avec eux et derrière eux les autres conservateurs de nuances diverses, partout où ces derniers ne sont pas les plus forts. Il n’y a là rien qui soit offensant pour qui que ce soit, rien qui ne soit conforme à la logique et à la vérité des faits. J’ai conscience, en soutenant cette doctrine, de répondre au désir du pays républicain et, je le crois aussi, au sentiment de la véritable majorité républicaine des Chambres. » — On peut juger, par cet échantillon, de l’éloquence de M. Combes. Sa doctrine, comme il dit, nous importe peu : il faut voir le but réel de son discours, qui était d’atteindre le ministère à travers sa majorité. Cette majorité est, en effet, assez différente de celle qui l’a soutenu lui-même. M. Clemenceau ne s’y est pas trompé, et on n’a pas tardé à le voir dans ce qu’on peut appeler sa réplique. — « Sans doute, a-t-il dit, le succès