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Nawab, quand il entendit ces paroles, ne put contenir sa colère, il tire son épée du fourreau. Il commande à Bangarounaïker de rassembler les troupes, d’écrire aux cent soixante-douze Paléagars... »

Suit une énumération des forces d’où il découle que l’armée du Nawab couvre en superficie cent soixante kilomètres. Le Nawab est à sa tête, en personne ; monté sur son éléphant couvert de pierreries, il invoque Allah. Et voici l’ennemi campé à nouveau devant Genji où Desing, tout à ses dévotions, demeure insensible aux pires dégâts, tels que le sac de Déivanépettou.

L’histoire recommence alors avec l’intervention de l’oncle. Insensible à tout, Desing ne s’émeut qu’à la nouvelle du grand sacrilège des musulmans. Ils ont dévasté, pillé la pagode de Ranganaden. C’en est trop. Le rajah de Genji se fait vêtir et armer. Il expédie trois pions vers son cher Movottoucaren, à Valdaour. Celui-ci était en train de célébrer son mariage. Sans écouter les lamentations de ses parens, il part aussitôt, dans son costume de marié, avec le « kankanasa » de safran lié à sa main droite par une tresse. Movottoucaren monte à cheval. Bientôt il arrive à Genji. En vain trois cents cavaliers tentent de l’arrêter. Plus rapide qu’un météore, il les disperse, bouscule le Nawab, traverse son camp et rejoint Desing.

Le premier soin des deux amis est de se féliciter sur le bonheur de posséder le courage guerrier : « Un brave ne tient pas compte de son épouse. Moi, Desing, je suis marié depuis trois ans et je n’ai pas encore vu le visage de ma femme. Aujourd’hui, pourtant, je la verrai, et je prendrai congé d’elle ! » Mais, respectueux des devoirs de famille, Desing demande au Roi son oncle la permission d’engager le combat.

« Mon cher neveu, n’allez pas à la guerre aujourd’hui, c’est un mauvais jour. Vous naquîtes un vendredi, un vendredi fut le jour de naissance de la Reine, et votre cheval est né un vendredi. C’est un vendredi que commence cette guerre. Attendez à demain ! Vous êtes jeune encore pour vous lancer dans une aussi périlleuse action. Et vous ne pouvez voir le visage de la Reine avant six mois. Ainsi en décida le Gourou, votre maître spirituel et le mien. Si vous voyez votre femme avant ce terme, un grand malheur, sans faute, vous atteindra. »