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chemin de fer de l’État ne peut être fixé que par une loi : cette loi est déjà déposée devant la Chambre des députés. Mais, comme il faudra peut-être longtemps avant qu’elle soit votée, et que, d’autre part, le gouvernement entend rester maître de choisir le moment où il notifiera son rachat à la Compagnie de l’Ouest, l’article 2, dans son texte primitif, prévoyait comme possible une période transitoire et décidait que, pendant son cours, les conditions de l’exploitation seraient déterminées par un décret. Autant dire qu’on appliquerait la loi avant qu’elle fût votée, car le décret serait vraisemblablement calqué sur la loi. Il y avait dans cette prétention quelque chose de si excessif qu’un sénateur radical, M. Lintilhac, a déposé un amendement en vertu duquel le vote de la loi devait précéder la notification du rachat. M. le ministre des Travaux publics a combattu cet amendement, que son auteur s’est d’ailleurs empressé de retirer, sous prétexte qu’il empêcherait le gouvernement de choisir son heure pour la notification du rachat à la compagnie. Mais le gouvernement a accepté une nouvelle rédaction de l’article 2, proposée par la Commission dans les termes suivans : « Il sera statué par une loi spéciale sur l’organisation et l’administration du réseau. Les dépenses financières destinées à pourvoir aux dépenses de toute nature qu’entraîneraient le rachat et l’exploitation du réseau jusqu’au jour de la promulgation de cette loi spéciale, ainsi que les conditions générales d’administration provisoire, seront déterminées par une loi. » La Commission présentant ce texte d’accord avec le gouvernement, il a été voté ; mais que signifie-t-il au juste ? Nous avouons n’en rien savoir. Il peut signifier la même chose que l’amendement de M. Lintilhac ; il peut aussi ne signifier rien du tout, et c’est ce qu’a insinué M. le ministre des Finances, lorsqu’il a dit que, toutes les mesures à prendre devant entraîner des demandes de crédit, on aurait pu, en somme, se passer de l’article 2, puisqu’il est clair qu’il faut une loi pour avoir un crédit. Mais alors, que devient la liberté du gouvernement de notifier le rachat quand il voudra ? Pourra-t-il le faire avant d’avoir obtenu les crédits indispensables pour assurer l’exploitation du réseau ? Est-il certain d’avance d’obtenir tous ceux qu’il demandera ? A-t-il la prétention d’escompter le vote de la Chambre et du Sénat ? Leur présentera-t-il une demande de crédit comme la carte forcée ? Enfin le texte voté ne vise pas seulement des demandes de crédit, puisqu’il dit que les « conditions générales d’administration provisoire » seront déterminées par une loi. Il est possible que cela n’ait aucun sens, mais, si cela en a un, ce ne peut être que celui que M. Lintilhac avait attaché