Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/846

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

encore, elle blâme sévèrement la précipitation de Marseille, à communiquer de son chef les Statuts à Montpellier et à Beaucaire.



On lui fit écrire, rapporte d’Argenson, qu’elle avait agi contre les règlemens et que cette conduite détruirait la correspondance que toutes les Compagnies du royaume devaient avoir avec celle de Paris pour les maintenir dans l’esprit primitif…


Enfin, de nouveau en 1655, elle refuse à plusieurs Compagnies la correspondance qu’elles demandaient avec celles de leur ressort, et elle insère dans le « registre » les motifs qu’elle en a « Le principal était que cela rompait une unité que toutes les Compagnies devaient avoir avec celle de Paris et détruisait leur subordination, qui leur donnait bénédiction. »

Dans sa juste conception de la discipline indispensable à une association vaste, elle conservait l’aversion raisonnée pour les groupemens particuliers qui désagrègent, pour ces autonomies locales où se dissout, avec l’unité, la force efficace.

Malheureusement, cette prétention de rester le lien vivant de tous les groupes et leur commun organe de correspondance, devenait de plus en plus insoutenable avec l’extension de la Société. La Compagnie parisienne était débordée. Elle ne suffisait plus à cette fonction d’intermédiaire central qu’elle avait d’abord assumée. Elle mettait longtemps à traiter les affaires qui lui étaient confiées, longtemps même à répondre aux avis qu’on lui donnait. Marseille se plaint, et Paris n’avait qu’à demander pardon :


Nous vous prions de nous excuser et d’attribuer ce retardement à la multiplicité et au grand nombre des affaires qui nous surviennent, et de notre correspondance avec quarante-sept Compagnies des provinces, et de nos propres occupations et emplois.


Dès lors, des concessions aux vœux de « décentralisation » s’imposaient. Force était d’octroyer aux Compagnies provinciales la licence de « rapports » directs, sans passer par Paris. Et après avoir grondé Marseille de ses relations avec la Compagnie d’Avignon « qui ne se conforme pas aux règlemens, » on était obligé de l’autoriser tout de même à rester en communication avec cette Compagnie, qui, sans cet appui, « ne subsisterait pas, » et de donner carte blanche aux Marseillais pour leur conduite en cette occurrence : « De tout cela nous laissons la disposition à votre prudence et au zèle que vous témoignez pour garder l’uniformité de nos statuts. »