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Coblentz à s’aventurer sur les terrains les plus variés compromettait plutôt qu’elle ne fortifiait leur action principale, qui visait l’infaillibilité. Car en même temps qu’ils voulaient dissuader le concile de déférer aux vœux de ce qu’ils appelaient une école, ils proposaient en bloc à sa ratification, en matière intellectuelle, canonique, politique, les vœux d’une autre école ; et du jour où l’anti-infaillibilisme apparaissait comme étroitement lié à un certain système de fronde, la définition conciliaire semblait d’autant plus urgente et d’autant plus justifiée, que Stumpf se flattait d’avoir à sa suite « les neuf dixièmes des Allemands intelligens, » On pouvait estimer, même, qu’en prenant l’initiative de cette définition le concile opposerait la plus efficace des réponses à ceux qui demandaient, comme le faisait Stumpf dans une lettre à l’évêque d’Ermeland, que des synodes diocésains fussent préalablement réunis, où les laïques seraient représentés. C’était considérer l’assemblée œcuménique comme une émanation des assemblées primaires de la chrétienté, et comme tenant son pouvoir d’en bas plus que d’en haut. Mais dès lors, puisque la souveraineté du concile était en butte aux mêmes suspicions que celle du Pape, la spontanéité même avec laquelle le concile exalterait le Pape attesterait le droit de l’autorité conciliaire et témoignerait avec éclat qu’un concile œcuménique était quelque chose de plus et quelque chose d’autre que l’étage supérieur de je ne sais quel parlementarisme ecclésiastique.

Leur sens catholique, plus encore que leur habileté tactique, dissuada les parlementaires de Berlin d’imiter la faute commise à Coblentz. En juin 1869, les Rhénans Pierre Reichensperger et Hosius, le Hanovrien Windthorst, les Bavarois Joerg et Freitag, le Wurtembergeois Probst, s’étant rencontrés au Parlement douanier, se confièrent les craintes que l’infaillibilité leur inspirait. Ils redoutaient spécialement, comme l’expliqua plus tard un d’entre eux, les prétextes qu’elle pourrait offrir à des États malveillans, pour une politique de persécutions. Une réunion de catholiques, par eux convoquée, fut assez confuse : on était en désaccord sur les moyens d’exprimer l’appréhension commune. Joerg, qui dirigeait à Munich les Feuilles historico-politiques, fut chargé de s’enquérir. Ses luttes pour le romanisme, sa brouille avec son ancien ami Doellinger, son hostilité déclarée contre le manifeste de Coblentz, assuraient à Joerg la confiance des milieux les plus orthodoxes ; aucune plume n’était