Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 47.djvu/282

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui se compose, en outre, du marquis de Salisbury, ministre des Affaires étrangères ; de lord Odo Russell, ambassadeur à Berlin ; de M. Currie, conseiller d’ambassade ; de M. Austin Lee, du général Simmons et d’une escorte de jeunes secrétaires d’ambassade, parmi lesquels M. J. Bertie, M. Le Marchand Gosselin, à titre de secrétaire de lord Salisbury, M. Arthur Balfour. La Russie a délégué le prince Gortschakoff, chancelier de l’Empire ; le comte Schouwaloff, ambassadeur à Londres ; le baron d’Oubril, ambassadeur à Berlin ; le baron Jomini, le colonel Bobrikow, le colonel Bogoljubow, etc. L’Italie a pour représentans principaux le comte Corti, ministre des Affaires étrangères, le comte de Launay, ambassadeur à Berlin. La délégation turque a à sa tête Carathéodory pacha, mustechar du ministère des Affaires étrangères, avec Sadoullah bey, Mohamed-Ali pacha, Feridoun bey. Enfin, la France a délégué le ministre des Affaires étrangères, M. Waddington. Il est accompagné de M. de Saint-Vallier, comme second plénipotentiaire. La mission comprend, en outre, M. Desprez, directeur des Affaires politiques ; le comte de Mouy, M. Ducléré et quelques attachés.

Donc, la France est venue occuper sa place dans la famille des grandes puissances européennes. M. Gambetta avait hésité sur la décision à prendre : son premier mouvement avait été l’abstention[1]. Il s’était rendu à l’argument né en face de lui, et qui n’était probablement qu’un retour de ses propres réflexions sur lui-même : ne pas aller à Berlin, ce serait ou une lâcheté ou une agression. Il était facile d’apercevoir les inconvéniens de la participation au Congrès ; mais on n’eût vu qu’après les périls de l’abstention. Une seule puissance, en Europe, marchandait alors son concours, c’était l’Angleterre. La France déclinant l’invitation, et l’Angleterre fortifiée dans ses réserves, le Congrès n’avait pas lieu ; or, le traité de San-Stefano paraissant inacceptable, il n’y avait plus d’issue que la guerre ou une reculade sans dignité pour la Russie. La Russie recherchait, alors, très vivement une alliance défensive et offensive avec l’Allemagne[2] : si la France

  1. On trouve une trace des hésitations du gouvernement jusque dans les documens officiels. M. Waddington télégraphie, le 16 février, à l’ambassadeur à Saint-Pétersbourg : » Bien que la conférence n’ait pas un grand attrait pour nous, etc. » Livre jaune. Congrès de Berlin, p. II.
  2. Voyez tout le passage, si précis, des Souvenirs de Bismarck et la correspondance échangée par lui avec le comte Schouwaloff (p. 264 et suiv.) : « Avant le Congrès, le comte Schouwaloff toucha un mot d’une alliance offensive et défensive entre la Russie et l’Allemagne, puis il me fit la proposition directe, » et toute la discussion d’une si haute technique qui vient à la suite.