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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 47.djvu/403

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« Le travail de compilation et de composition des chants liturgiques, attribué traditionnellement à saint Grégoire le Grand, fut en réalité l’œuvre des papes hellènes de la fin du VIIe siècle au commencement du VIIIe ; c’est le pape Serge Ier (687-701), musicien distingué, qui en est le principal inspirateur. L’Antiphonaire a reçu sa forme définitive entre l’avènement de Léon II (682) et celui de Grégoire II (715). Quant à saint Grégoire, il ne s’est jamais occupé de musique que pour défendre l’exécution du chant au clergé séculier. »

Dès le milieu du IVe siècle, avec la Cour et l’aristocratie, les artistes d’origine hellénique, instrumentistes ou chanteurs, compositeurs ou littérateurs, ont émigré à Constantinople. A dater de 350, les peuples d’Italie, d’Espagne, de Gaule, de Germanie, ne chantent plus qu’en latin ; d’autre part, la notation musicale au moyen des signes de l’alphabet grec, généralement comprise encore sous Constantin, tombe peu après en désuétude tant en Orient qu’en Occident, de sorte que la « transmission des œuvres musicales ne se fait plus que de maître à disciple et à l’aide de la seule mémoire. » Quel siècle étonnant par ses contrastes ! A Milan, saint Ambroise et saint Augustin prêchant la doctrine du Christ ; à Byzance, l’empereur Julien essayant d’inaugurer un nouveau paganisme par le rajeunissement des symboles de l’ancien ; à Rome, une société à demi chrétienne, fort tolérante, de mœurs assez légères ; des luttes politiques et religieuses, l’hérésie d’Arius... et c’est à ce moment que commence pour nous l’histoire de l’Antiphonaire. Çà et là se recueillent pieusement les plus caractéristiques, les plus populaires des vieilles cantilènes ; aux textes grecs, on substitue du latin ; les mots changent, l’esprit reste, c’est-à-dire la musique. Saint Ambroise et saint Augustin composent les paroles du Te Deum sur la vénérable mélopée dorienne, l’immortelle action de grâces que la légende fait dater du soir de Salamine et qu’on entendait à Rome les grands jours de triomphe. Sur les mélodies des