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étude, qui nous dispense — ou plutôt nous interdit — de reprendre la question, « comment ceux qui n’étaient, il y a cent vingt-cinq ans, qu’un peu plus du centième de la population de l’Union, 30 ou 40 000 âmes sur 3 millions d’habitans, en sont devenus le septième... » L’Église catholique est de beaucoup la plus étendue de toutes les « dénominations » religieuses. A ceux qui s’en réjouissent et en tirent des espérances, les sceptiques et les intransigeans, les adversaires de gauche et de droite, ceux qui ne tiennent pas à voir le catholicisme se développer et ceux qui se forgent une chimère de l’ « américanisme, » demandent à interpréter ces progrès, s’attachent à démontrer qu’ils n’ont rien de « phénoménal » si on ne les considère « ni avec les illusions d’un néophyte ni avec la virtuosité d’un littérateur[1] » et, pour une fois, se réconcilient dans cette constatation. Nous n’avons que faire de reprendre cette querelle, car si la question des progrès du catholicisme est en effet fort complexe, ce n’est point au sens où nous les entendons ici. Sans doute l’interprétation des chiffres a son importance et l’évaluation numérique son intérêt. Il serait digne d’attention, et à certains égards indispensable, de savoir combien parmi les immigrans catholiques ou leurs descendans restent attachés à leur foi, combien deviennent indifférens ou apostasient, quel est le nombre des conversions protestantes, etc. Mais ce n’est point notre objet. Ce que personne ne pourrait nier, ni mettre en doute, c’est la situation générale du catholicisme, la considération, la popularité même dont il jouit et le prestige qui l’entoure. En veut-on quelques indices ? Au mois de novembre 1889, le président Harrisson assiste à l’ouverture de l’Université catholique de Washington. En 1892, l’Exposition de Chicago est inaugurée par une prière du cardinal Gibbons et, à la cérémonie du soir, Mgr Ireland est chargé de prononcer le discours principal. Le congrès des catholiques est salué par le commissaire de l’Exposition au nom du gouvernement des Etats-Unis et « au nom de cinquante millions d’Américains non catholiques qui aiment la justice et ont foi dans une égale liberté religieuse pour tous les hommes. » Et M. C.-C Bonney ajoute ces paroles : « Le nouveau mouvement catholique qui tend à décharger et à relever les classes ouvrières, ce mouvement qu’a porté si haut l’Encyclique pontificale sur la condition des

  1. A. Houtin, L’Américanisme.