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1 554 chambres, qui sont occupées tous les soirs. Ascenseurs rapides, lavabos avec serviette et savon gratuits à tous les étages, cinquante cabines à douches avec appareils automatiques, plusieurs cuves de pierres, munies de robinets d’eau chaude et d’eau froide pour le lavage personnel du linge, voilà de quoi dispose, en plus de sa chambre, chaque client, moyennant vingt sous par nuit, — moins de dix sous en Europe, — « le prix qu’on vous demande pour blanchir une chemise, ou quatre mouchoirs, ou quatre faux-cols[1]. »

De grandes associations de bien public, la Y. M. C. A. et la Y. W. C. A. (Young Men et Young Women Christian Association), la Young Catholic’s Friendhj Society, la Société de l’Effort chrétien (Christian Endeavour), l’Ordre des Filles du Roi, l’Armée du Salut et bien d’autres, travaillent, chacune à sa manière et avec ses moyens, à atténuer les conséquences de la misère, à combattre l’ignorance et le vice, à armer l’individu pour la vie, à l’adapter à la société, à le rendre, pour tout dire, meilleur et plus heureux. Car les deux choses ne se séparent guère en Amérique, et c’est un des caractères de l’action sociale chez ce peuple positif. Elle offre toujours les avantages matériels en même temps que des secours d’un autre ordre ; elle étaie ceux-ci sur les premiers, comme la vie morale s’appuie sur la vie physique. M. de Rousiers nous signale à ce propos un rapprochement qui le frappa, deux réclames de la Y. M. C. A., rencontrées un jour à Baltimore à quelques heures de distance : « La première... était l’annonce d’une conférence sur la chasteté, avec ce titre auquel bien peu de Français refuseraient un sourire : Histoire de Joseph, homme pur. » La seconde affiche faisait valoir tout ce que l’Association donne en échange d’une cotisation annuelle de 25 francs : gymnase avec les appareils les plus perfectionnés, bains, douches en pluie et en jet, classes d’instruction pour tenue de livres, écriture, sténographie, machines à écrire, langue allemande, musique, dessin, etc.

Que ces œuvres soient ou non confessionnelles, elles témoignent de l’esprit le plus large, et si elles s’inspirent de croyances religieuses ou d’opinions philosophiques, elles les subordonnent sincèrement au but charitable, car il faut agir. C’est pourquoi, loin de se jalouser et de se combattre, elles

  1. J. Huret, op. cit., I, 226.