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d’être libérées entièrement. Mais, chaque année, on verse plus de 50 000 francs à un fonds d’ « amortissement anticipé. »

Quant aux « œuvres sociales, » — service médical, bibliothèque, caisses de chômage et de propagande, — les dépenses qu’elles occasionnent n’entament point la fortune de la collectivité ; elles sont couvertes par un prélèvement de 10 pour 100 sur les bénéfices. Ainsi que le fonds d’amortissement, le budget de la solidarité est le produit pur et simple de sacrifices immédiats consentis par les sociétaires : il appauvrit le « trop perçu, » restitué à la fin du semestre, mais il est sans répercussion sur l’avenir. En principe, le montant du dividende distribué ne doit pas être supérieur à 5 pour 100 ; et, en ne descendant pas au-dessous de ce chiffre, l’administration a eu la sagesse de ne demander à ses membres que ce qu’elle pouvait obtenir sans les mécontenter.


Nous venons de voir les sociétés coopératives les mieux organisées ; mais on ne saurait juger l’ensemble sur ces exceptions intéressantes ; et l’ensemble se présente mal.

Comme nous le savons déjà, beaucoup de sociétés accusent, par leur aspect et leur situation géographique, un détachement étrange des préjugés du consommateur, qui est une maladresse ; et, par la vaine ampleur de locaux somptueux, plusieurs autres témoignent d’un souci prématuré de fonctions accessoires, qui est une imprévoyance.

Mais ce qui est encore plus significatif, les coopératives parisiennes ont reculé devant les tâches sérieuses, dont elles proclament la nécessité, en déclamations incessantes, pour l’amélioration de l’existence des travailleurs. La question du pain et de la viande à bon marché a été presque partout écartée, non parce qu’elles en ont méconnu l’importance, mais parce qu’elles ont été incapables de l’effort approprié. La Bellevilloise seule a pu créer et maintenir une boulangerie.

L’Association des employés civils, l’Égalitaire, l’Avenir de Plaisance, la Bellevilloise, sont les seules sociétés qui aient établi des boucheries annexes. Encore, ces boucheries n’ont-elles pas d’analogie avec les vingt-quatre boucheries de province, qui achètent les animaux vivans sur les marchés publics. Ces quatre sociétés achètent « à la cheville, » c’est-à-dire, qu’elles se procurent aux abattoirs de la Villette, par leur chef-boucher, les