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celui des frais généraux s’élève à 13 pour 100. J’ai fait le même calcul pour les 1 448 sociétés coopératives de la Grande-Bretagne à l’aide de la statistique très précise de l’Union coopérative anglaise : le dividende est de 13 pour 100, et les frais généraux ne dépassent pas 8 pour 100. Or, les sociétés anglaises sont en très grande majorité ouvrières ; et leur commerce, étendu à des objets variés, à des branches difficiles, est plutôt fait pour augmenter les frais généraux. La création de leurs boucheries, de leurs abattoirs, de leurs magasins annexes de draperie ont nécessité un effort inconnu chez les sociétés parisiennes. Cependant, malgré toutes ces charges, elles dépensent moins en frais d’administration que les sociétés parisiennes, dont l’unique préoccupation est d’acheter pour revendre.

Énormité des frais, faiblesse des bénéfices, infidélité évidente de la clientèle, tous ces faits se complètent pour éclairer d’un jour déjà lumineux la physionomie des coopératives : elles ne sont pas économes, et ne donnent à leurs membres qu’une satisfaction médiocre.

A quoi faut-il attribuer la faiblesse, presque générale, des affaires ? L’explication des administrateurs est très simple ; elle est comme stéréotypée dans la plupart de leurs rapports : « Si nos sociétaires comprenaient mieux leur devoir, le chiffre de nos ventes pourrait être doublé, triplé. » Ou encore : « Nous avons le regret de dire que le rayon de la boucherie est en perte. Ce résultat est dû à l’indifférence des sociétaires… » L’argument est d’une parfaite puérilité ; et en attribuant exclusivement leur insuccès à l’imparfaite éducation des membres, les administrateurs donnent une explication, satisfaisante pour leur amour-propre, mais contraire à la réalité des choses. En dépit des apparences fâcheuses de leurs magasins, si les sociétés livraient des produits toujours irréprochables, leur bonne renommée finirait par triompher de tous les préjugés du monde.


Mais, quand nous avons constaté que les coopératives ne sont pas économes, et qu’elles ne satisfont pas leurs membres, nous ne pouvons considérer ce résultat comme le dernier terme de notre enquête : il n’est que le point de départ d’une recherche infiniment plus intéressante. D’où vient que l’administration coopérative est si coûteuse et si inhabile ?