Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 49.djvu/432

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme préliminaire à ce vaste travail de la constitution de la propriété individuelle et l’on vit alors des commissaires délimitateurs aller au sein des tribus procéder aux diverses opérations que nécessitait la répartition respective des terres domaniales et des terres indivises. Au mois de décembre 1870 on avait ainsi délimité 656 douars ou fractions de tribus comptant une population de 1 057 060 habitans et présentant une superficie de 6 888 751 hectares, sur lesquels on avait attribué à l’État 1 183 114 hectares, lorsqu’un décret du gouvernement de la Défense nationale, qui voyait dans cette mesure une cause de détresse pour les indigènes, vint en suspendre l’exécution.

Malheureusement l’insurrection de 1871 vint tout remettre en question en faisant revivre les anciens sentimens d’hostilité contre les indigènes et provoqua de nouvelles mesures de rigueur à leur égard. 446 406 hectares furent alors enlevés d’un coup aux tribus insurgées, et en même temps que ces spoliations violentes avaient lieu, des procédés plus détournés furent employés pour les dépouiller de ce qui leur restait de leurs biens. C’est ainsi qu’en 1873, M. Varnier, député algérien, fit voter une loi relative « à l’établissement et à la conservation de la propriété en Algérie. » Cette formule anodine ne visait rien moins que la remise en application du sénatus-consulte de 1863 en la complétant et en la modifiant. La loi nouvelle disposa que le périmètre de la tribu une fois déterminé et divisé en lots individuels, un titre serait délivré à chaque ayant-droit. Il fallut, pour chaque lot, restituer la filiation de la tribu, trouver les héritiers, parmi lesquels des veuves, parfois disparues ; déterminer les parts en fractions décimales et enfin délivrer à chaque ayant droit un titre constatant des parts indivises, souvent infimes. D’autres mesures fâcheuses vinrent encore aggraver les inconvéniens de la loi de 1873. Une circulaire de 1876 interdit aux cadis indigènes de connaître des transactions et contestations foncières ; puis fut votée la loi sur la constitution de l’état civil des indigènes. Enfin la loi du 28 avril 1887 disposa qu’il serait procédé administrativement aux opérations de délimitation et de répartition dans toutes les tribus où ces opérations n’avaient pas encore eu lieu ; elle établit en même temps une procédure rapide pour le partage des immeubles restés indivis après la délivrance des titres, appliqua aux partages et licitations la loi française, et