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furent dressés en 1883 et 1890, et les condamnations pécuniaires montèrent en une seule année à 1 600 000 francs. De par l’application des dispositions de notre Code forestier à l’Algérie, le gouvernement de toute la population indigène qui vit de la forêt et qui s’élève à près de 800 000 individus est passé, en fait, aux mains de l’administration forestière ou plutôt de ses agens subalternes, et cette population est tombée dans un dénûment tel que d’aucuns n’ont pas craint de le comparer à celui des parias de l’Inde ou à celui des miséreux d’Irlande.


V. — TRANSFORMATION DES INSTITUTIONS ADMINISTRATIVES, CIVILES ET JUDICIAIRES DES INDIGÈNES

Les institutions administratives, civiles et judiciaires des indigènes ont été maintenues plus longtemps que leurs institutions économiques, l’utilité d’assumer la responsabilité de l’administration directe de nos sujets musulmans n’ayant pas paru tout d’abord au gouvernement présenter un intérêt aussi urgent que la modification de la propriété foncière indigène. Lors de la division en 1844 de l’Algérie en territoire civil et territoire militaire, seuls les indigènes habitant le territoire civil perdirent leur autonomie administrative, et vécurent côte à côte avec les Européens, tantôt dans un seul centre, tantôt et le plus souvent dans des douars annexés à un centre chef-lieu, centre qui fut appelé commune de plein exercice et qui eut une administration analogue à celle de nos communes métropolitaines : un conseil municipal élu, des adjoints, un maire. Mais à l’origine le territoire civil était excessivement restreint, borné aux quelques villes de la côte et du Tell, aux points stratégiques et aux villages de colonisation officiels. Dans tout le reste du pays les indigènes conservèrent leur origine patriarcale ou féodale sous l’autorité des bureaux arabes. Le territoire militaire de chaque département formait une division partagée en subdivisions, cercles, annexes et en communes. A la tête de l’administration de la commune fut le commandant supérieur du cercle, assisté d’une commission mixte où figuraient le chef du bureau arabe et des caïds en nombre égal à celui des tribus comprises dans la circonscription communale. On a beaucoup incriminé les bureaux arabes et le régime militaire qu’ils personnifiaient ; on les a accusés de former un corps puissant et exclusif, de suivre