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— il faut répéter le mot, — que les pages qu’on a pu lire ici même, sur Auguste Comte. J’aurais, personnellement, peut-être certaines réserves à présenter sur les articles relatifs à Lamennais, à Taine, surtout à Bonald. Mais combien d’autres, — sur Joseph de Maistre, par exemple, sur Benjamin Constant, sur Ballanche, sur Renan, — dont il sera difficile de surpasser, ou même d’égaler, la lumineuse et agile concision !

À ces nouveaux sujets d’études politiques et morales, M. Faguet applique toujours la même méthode d’analyse et de reconstruction que nous avons essayé de définir tout à l’heure ; mais cette fois, elle est appliquée à des esprits dans lesquels le critique entre pleinement, et qui ont agité des problèmes qui l’intéressent lui-même passionnément. Aucun, ou presque aucun des écrivains qu’il a étudiés dans ces trois volumes n’a écrit pour écrire, mais pour répandre des idées, et pour agir. Ce sont tous, à l’exception peut-être de ce pauvre homme de Stendhal, « des esprits penseurs. » Aussi, quelle joie d’entrer dans l’intimité de ces hautes intelligences, de contempler longuement les palais d’idées qu’ils ont construits et où ils voulaient abriter l’humanité tout entière, d’en examiner le fort et le faible, et, sans rien dissimuler des vices secrets de l’édifice, de le reconstruire sous les yeux du lecteur, parfois plus solide et plus harmonieux qu’il ne l’était dans la réalité de l’histoire ! M. Faguet s’est donné cette joie, et il nous l’a fait partager. Suivant son habitude, il a fait de chacun de ces trois volumes un recueil de monographies, et en tête de chacun d’eux il a mis une Préface où il ramassait les vues d’ensemble que ses études particulières lui suggéraient sur la période historique qu’il examinait. Mais, à la manière dont il a conçu sa tâche, ces trois volumes constituent une véritable enquête sur l’histoire morale du XIXe siècle. Essayons d’en indiquer l’esprit et d’en dégager les conclusions.

Ces études sur les Politiques et Moralistes du XIXe siècle sont la suite directe et logique des « études littéraires » sur le Dix-huitième siècle. L’attitude d’esprit qu’elles manifestent n’a pas varié : c’est, dans les deux cas, le témoignage très impartial, très objectif, d’un positiviste, mais d’un vrai positiviste, à la manière de Comte, non pas à celle de Littré.

Sur ces hautes questions de morale individuelle et sociale, de la solution desquelles dépend l’avenir prochain de la patrie commune, et peut-être même de l’humanité, les deux derniers