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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/907

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inhibitions et défenses à toutes personnes, de quelque qualité et condition qu’elles fussent, de faire aucunes assemblées en cette ville et partout ailleurs, sans l’expresse permission du Roi et lettres patentes vérifiées, comme aussi de tenir aucunes prisons pour retenir aucuns sujets du Roi contre leur volonté, sous quelque prétexte que ce fût. » Et bien que cet arrêt, rendu sous la présidence d’un des membres de la Compagnie, Lamoignon, fût rédigé et « adouci » par lui de telle sorte que la Compagnie n’y parût pas expressément, il y avait dans les considérans des mots fâcheux : les mots de « cabale, » d’ « intrigues ruineuses au service du Roi, de l’Etat et du public… » Plus fâcheux encore était le commandement donné aux commissaires du Châtelet de se transporter « en tous les endroits où ils auront advis que pareilles assemblées se tiennent. » Dès lors, il fallait bien que les conditions d’existence de la Compagnie changeassent.

Sans doute, et grâce, selon toute apparence, aux manœuvres protectrices de Lamoignon, elle ne fut pas acculée à une dissolution immédiate. Elle eut cinq années de répit, et qu’elle mit merveilleusement à profit. De 1661 à 1666, dans la gêne où elle est réduite, « son esprit se conserve néanmoins tout entier, » déclare avec orgueil d’Argenson, et « l’on y travailla comme on avait coutume de le faire » dans le temps de la sécurité libre. On travailla aux missions étrangères, — à celle de la Suède, comme à celle des Indes ; — aux missions intérieures, — à celle du pays de Gex, comme à celle de Saint-Germain-en-Laye, car il importait plus que jamais d’ « évangéliser » cette Cour hostile. On continua de chercher les moyens de doter chaque diocèse d’un séminaire. On reprit encore une autre ingénieuse idée des commencemens de la Compagnie : créer, « pour servir dans les cures négligées, » des « vicaires ambulans. » On persista, malgré le mauvais succès, à harceler les curés et les évêques pour qu’ils contraignissent les médecins à faire confesser les malades. On s’ouvrit à plusieurs projets nouveaux : celui de faire ensevelir chrétiennement les corps des suppliciés, « après que les chirurgiens en ont fait l’anatomie, » — celui d’une Banque catholique. — Même on resta aussi belliqueux contre tous les ennemis de la foi qu’aux jours de Louis XIII : on empêcha des Huguenots d’entrer dans les Compagnies de commerce ; on fit brûler un visionnaire, Simon Morin (14 mars 1663) ; on contribua grandement, en 1664, à la suppression de « la méchante comédie de