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REVUES ÉTRANGÈRES

UNE SECONDE PARTIE DE LA FLÛTE ENCHANTÉE


Gœthes Fortsetzung der Mozartschen Zauberflœte, par M. Victor Junk, 1 vol. in-8, Berlin, librairie Alexandre Düncker.


J’ai lu dans les journaux que la direction de l’Opéra-Comique avait, pendant ces vacances, demandé aux nouveaux traducteurs de la Flûte Enchantée un remaniement complet de leur livret, ou plutôt de la partie « parlée » de celui-ci : avec l’espoir de rendre ainsi plus courts, et moins ennuyeux, ces innombrables bavardages dont M. Camille Bellaigue nous a dit très justement, ici même, à quel point leur pesante et vulgaire sottise contrastait avec la noble ou charmante beauté des airs, des ensembles, et des chœurs de Mozart[1]. Mais je crains fort que tous les changemens apportés à la traduction de MM. Paul Ferrier et Alexandre Bisson ne parviennent jamais à réconcilier le public français avec un libretto qui, par-dessous la platitude et la banalité de ses plaisanteries, souffre encore d’un manque profond d’unité dramatique, résultant des conditions singulières où l’on sait qu’il a été conçu et écrit par son premier auteur. Qu’on imagine, par exemple, Molière se mettant tout à coup, dans les derniers actes de Tartufe, à nous représenter Tartufe lui-même comme le personnage sympathique de la comédie, tandis que le frère et la femme d’Orgon deviendraient une paire de rusés coquins s’acharnant à la ruine de l’ex-hypocrite, transformé dorénavant en un modèle de toutes les vertus : c’est, exactement, l’incroyable aventure

  1. Voyez la Revue du 15 juillet 1909.