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aujourd’hui ; il est même indispensable de ne pas les perdre de vue, si l’on veut sainement apprécier les choses. N’entend-on pas dire, en effet, bien souvent : « Quel intérêt présentent les dirigeables ou les aéroplanes ? Cela ne va pas plus vite que les chemins de fer, cela a beaucoup moins de puissance de transport que les bateaux ; ne vaudrait-il pas mieux, au lieu de chercher un mode de locomotion nouveau, perfectionner les vieux véhicules terrestres ou aquatiques ? »

Si la navigation aérienne ne différait pas, par ses propriétés essentielles, des deux autres modes de locomotion connus de toute antiquité, cette manière de voir serait très rationnelle ; et si l’on poursuit avec tant d’acharnement la conquête de l’air, si le public suit ses progrès avec un intérêt aussi grand, ce n’est pas parce qu’on espère trouver ainsi le moyen de posséder, à un plus haut degré, les qualités de vitesse ou de puissance désirables pour tout véhicule ; c’est en raison des propriétés toutes spéciales de la navigation aérienne. S’il n’en était pas ainsi, la conquête de l’air serait certainement une chose intéressante, mais ne vaudrait pas tous les efforts qu’elle provoque, et l’intérêt palpitant qu’elle suscite ; on ne s’en rend peut-être pas toujours compte d’une manière explicite, mais c’est à l’heure actuelle une idée latente dans tous les esprits, et c’est à cause de cela que la recherche de la locomotion aérienne n’est pas un vain caprice de l’homme, mais correspond au sentiment profond et instinctif des changemens extraordinaires qu’elle apportera dans les conditions d’existence de l’humanité.

Il faut maintenant entrer plus avant dans l’étude détaillée des qualités que nous avons énumérées, et choisir les plus importantes.

La première qualité dont nous avons parlé est la faculté de s’élever le plus haut possible. Le moyen d’y parvenir est différent, suivant qu’il s’agit d’appareils plus lourds ou plus légers que l’air. Dans le premier cas, pour pouvoir s’élever, il faut disposer d’une puissance motrice supérieure à celle qui est nécessaire pour obtenir la sustentation et le déplacement horizontal ; c’est donc une question de puissance de moteur.

S’il s’agit, au contraire, d’un dirigeable, le moteur n’a pas à intervenir ; pour s’élever, il suffit de jeter une quantité de lest déterminée ; plus cette quantité sera grande pour un ballon donné, plus on montera haut. Il faut donc, indépendamment du