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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Bien que les Chambres se soient réunies le 19 octobre, le travail parlementaire ne commencera vraiment que dans les premiers jours de novembre. Le budget n’est pas prêt au Palais-Bourbon, et la loi sur les retraites ouvrières n’est pas encore arrivée, au Luxembourg, à sa parfaite mise au point. En attendant, la Chambre a entamé la discussion de la réforme électorale, qu’elle paraît d’ailleurs résolue à ne pas faire, la plupart des députés subordonnant l’intérêt général à leur intérêt particulier, et la majorité radicale craignant de ne pas revenir si elle changeait le mode de scrutin d’où elle est sortie en 1906.

Il s’en faut cependant que cette discussion soit purement académique. Elle ne fait que commencer, et il est encore trop tôt pour en indiquer la physionomie générale ; mais déjà des coups retentissans ont été frappés, et un discours comme celui de M. Paul Deschanel, par exemple, après avoir produit une vive impression sur son auditoire immédiat, ne saurait manquer d’avoir un grand retentissement dans le pays tout entier. Jamais M. Deschanel n’avait été mieux inspiré. En quelques phrases nerveuses et lumineuses, il a présenté tous les argumens en faveur de la réforme, et son éloquence sobre et forte leur a donné une forme lapidaire. La Chambre a beaucoup applaudi le talent de l’orateur ; elle n’a pas méconnu l’excellence de sa thèse ; mais entre la conviction qui ne s’adresse qu’à l’esprit et la persuasion qui entraîne les sentimens et les votes, il y a malheureusement très loin : peut-être aucune éloquence ne peut-elle faire naître cette persuasion à travers l’épaisse broussaille des intérêt « individuels. Ni M. Piou, ni M. Joseph Reinach n’y ont réussi. Le scrutin d’arrondissement a la vie dure. Quoiqu’il soit très mal défendu, il vaincra encore cette fois. Mais tout porte à croire que ce sera la dernière, et que le discrédit profond dans lequel il est tombé ne tardera pas à