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POÉSIE

LA FLÛTE ALEXANDRINE


LA FLÛTE


Si ta bouche s’adapte à la flûte embaumée,
Tu vivras dans l’extase et dans la renommée.
Si tes doigts, sur la tige illustre et dont les trous
Ont conservé l’odeur tenace du miel roux,
Dansent harmonieux et s’entremêlent prestes ;
Si, dans l’ombre ignorée où tu te plais et restes,
Un vierge accord suffit à ton rêve, ô Chanteur,
Ton souffle autour de toi frémira créateur
De cadences, tandis que ton art divinise
Les pâtres ceints de myrte, enivrés de conyze,
Et qu’épars aux vallons calmes, aux frais vergers,
Suspendus à l’essor de tes rythmes légers,
Les gardeurs de brebis et les charmeurs d’abeilles
Écoutent s’envoler les notes non pareilles,
Et naître à ton haleine et vibrer sous tes doigts
Le murmure inspiré qu’ébloui tu leur dois.