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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 56.djvu/650

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féconde en enseignemens et fournir des leçons qu’on ne saurait oublier. Les succès de la Prusse sont dus à la supériorité du nombre, à la rigoureuse discipline de son armée, à l’empire qu’exerce dans toute l’Allemagne le principe d’autorité. Que nos malheureux compatriotes, qui sont prisonniers, profitent au moins de leur séjour en Prusse pour apprécier ce que donnent de forces à un pays le pouvoir respecté, la loi obéie, l’esprit militaire et patriotique dominant tous les intérêts et toutes les opinions. Certes, la lutte était disproportionnée, mais elle aurait pu être plus disputée et moins désastreuse pour nos armes, si les opérations militaires n’avaient pas été sans cesse subordonnées à des considérations politiques. Nous aurions été aussi mieux préparés si les Chambres n’avaient pas sans cesse été préoccupées de réduire le budget de la Guerre et si elles ne s’étaient pas toujours opposées aux mesures qui devaient augmenter les forces nationales... A ces causes principales de nos revers nous devons ajouter les regrettables habitudes introduites dans l’armée par la guerre d’Afrique. Manque de discipline, manque d’ensemble, défaut d’ordre, exagération du poids que porte le soldat et du nombre de bagages des officiers, tels sont les abus qui se sont introduits dans nos armées... Le laisser aller de la tenue influe sur l’esprit militaire et cet abandon se reproduit dans tout le reste. On ne sert plus avec cette régularité, cet amour du devoir, cette abnégation de soi-même qui sont les premières qualités de ceux qui commandent comme de ceux qui obéissent.

« En résumé, l’Armée réfléchit toujours l’état de la société dans laquelle elle a été formée. Tant que le pouvoir en France a été fort et respecté, la constitution de l’Armée a présenté une solidité remarquable ; mais lorsque les violences de la tribune et de la presse sont venues affaiblir l’autorité et introduire partout l’esprit de critique et d’indiscipline, l’Armée s’en est ressentie. »

Ces réflexions de l’Empereur sont très justes. Sans chercher à excuser par elles la faiblesse des préparatifs de l’Empire, ni ses fautes, on ne peut nier qu’elles ne soient vraies de tout temps, et ce souhait qui termine la brochure impériale doit toujours être médité : « Dieu veuille que le drame terrible qui s’est déroulé serve de leçon pour l’avenir ! »


HENRI WELSCHINGER.