Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 56.djvu/872

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On eût dit qu’elle avait plaisir, dans la capitale protestante du Nord, à se déprécier et à s’accuser. Vœlk persiflait, l’insuffisance des écoles de Bavière. « Ce qu’est le niveau intellectuel de ce pays-là, criait le Bavarois Schauss, jugez-en par ce fait, qu’il a envoyé au Reichstag quatre membre du Centre. » De-ci, de-là, parmi ces diffamations bavaroises contre la Bavière, qui ravissaient d’aise l’orgueil prussien, se dessinait le projet politique de protéger contre la hiérarchie le clergé anti-romain. Lutz y faisait allusion ; Fischer obtenait des bravos en apportant l’écho des innombrables « soupirs sacerdotaux qui protestaient contre le joug jésuitique ; » Vœlk parlait avec une emphase émue de ce clergé inférieur, livré sans protection à l’arbitraire des chefs.

Les catholiques ripostaient. Windthorst mettait en relief la portée politique de l’événement ; il saluait l’« heure tragique par excellence » où ces messieurs de Bavière venaient « laver leur linge sale à Berlin. » Mallinckrodt étalait à nu les visées religieuses de l’adversaire ; « ce projet de loi, disait-il, n’est qu’un appel aux catholiques du dehors, aux fils qui ont quitté la maison de leur mère. »

On avait le sentiment général qu’à la loi pénale proposée, d’autres succéderaient, étapes successives d’une interminable persécution. Vœlk l’annonçait d’une voix triomphante : « Cette loi, s’écriait-il, ne sera pas un remède décisif, mais un début, car je crois qu’il y a là un point de départ pour ces mesures qui doivent protéger l’État contre la puissance envahissante du Welchisme, du romanisme dans l’Eglise. Nous, messieurs, nous n’avons pas provoqué le combat, mais nous l’acceptons, et l’esprit germanique remportera cette nouvelle victoire... » Plus froid, plus calme, tranchant comme un juriste, Gneist disait à son tour : « L’État doit avoir un pouvoir sur les confessions, s’il veut défendre la paix des populations mixtes. Donc cette loi doit être suivie par d’autres. » C’était justement cette perspective qui mettait en recul le progressiste Richter « Vous ferez des martyrs, déclarait-il aux nationaux-libéraux ; vous exciterez encore les ultramontains, et voilà tout. Vous n’avez d’autre souci que d’augmenter les moyens de défense de l’Etat, que d’aiguiser les armes de vos procureurs. Occupez-vous donc, plutôt, d’émanciper le peuple à l’endroit du clergé ; vous ferez besogne plus efficace. » Richter voulait qu’au lieu de guetter les prédicateurs