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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 58.djvu/609

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pourvoir, sans mécomptes, plus d’un million de rationnaires. La viande, fournie par des entrepreneurs, venait par voie de terre de la Sibérie orientale et de la Mongolie. Les trains étaient donc entièrement utilisés pour le transport des hommes et du matériel de guerre. Lorsqu’il fut décidé qu’Harbin serait la base des opérations, les constructions s’élevèrent de tous côtés avec méthode, des voies d’évitement furent disposées pour recevoir au besoin une grande quantité de trains sans arrêter le trafic. Tout fut établi dans les mêmes proportions, baraquemens, magasins, hôpitaux, ateliers de réparations.

Harbin est actuellement une des plus grandes stations-magasins du monde. A côté d’Harbin, sur la Sungari, une ville chinoise s’est élevée. C’est Pristah qui, très prospère pendant la guerre, est à peine désengorgée des marchandises que le départ des troupes ne lui a pas permis d’écouler. Mais, sur la rivière, l’activité des Chinois est toujours aussi grande. Leurs jonques, pour la plupart construites à Kirin, amènent les produits agricoles jusqu’à Nicolaïevsk. Plusieurs millions de planteurs chinois, gagnent peu à peu vers le Nord et l’excellence de leurs méthodes de culture défie la concurrence des Russes, dont les villages commencent à être noyés dans ces nouvelles agglomérations. La Mandchourie est une des plus riches provinces de la Chine, tant au point de vue minier qu’au point de vue agricole.

Elle est encore loin d’avoir la population qu’elle peut nourrir. Surpeuplée sur la rive Est de la Sungari, elle est presque vide sur la rive Ouest. En engageant plusieurs milliers de familles chinoises à émigrer de la province de Kirin dans celle de Tsisihar, le général tartare gouverneur a fait preuve de jugement. La province n’a que trois millions d’habitans et pourrait en nourrir vingt millions. Les rives de la Nonni qui baigne Tsisihar sont aujourd’hui ensemencées. Les pays de pâturages de la Mongolie commencent à être conquis par la culture. Dans le Sud-Est de Tsisihar, entre le désert de Gobi et la Mandchourie centrale, il se forme une nouvelle province, qui bientôt sera officiellement reconnue. D’après les projets chinois, une ligne de fer de 2000 kilomètres doit la traverser du Sud au Nord. Elle partirait de Pékin, et par Kalgan, Urga et Kiakhta, aboutirait au Transsibérien vers Udinsk. Depuis Kalgan, la région est en ce moment presque déserte. Ce chemin de fer la peuplera et les Chinois auront alors une nouvelle voie facilitant leur extension