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quelques secondes, une voie d’eau, surtout sous la pression des profondeurs, introduit à bord une masse parfois redoutable : or le sous-marin immergé, comme le ballon suspendu en l’air, se trouve en équilibre : il obéit à la moindre surcharge.

Les plombs de sécurité, à vrai dire, ne représentent plus qu’un faible lest sur les bateaux actuels. Trop lourds, ils deviendraient trop difficiles à lâcher. On les décroche en tournant, de l’intérieur, une tige qui les verrouille ; pour peu que le bateau soit incliné, et c’est le cas général en avarie, les frotte-mens gênent déjà la manœuvre et peuvent empêcher le déclenchement. On ne dépasse guère une quinzaine de tonnes, ce qui est peu pour des bâtimens de 450 tonneaux. La plupart des submersibles ne portent pas plus de 3 ou 4 tonneaux de plombs.

Le véritable moyen de défense du sous-marin, moyen toujours prêt et en état parce qu’il sert constamment, ce sont les chasses d’air. Ce qui caractérise, en effet, le sous-marin, c’est sa faculté d’absorber et de rendre de l’eau à volonté pour s’alourdir ou s’alléger. Il constitue un souffleur, dont toute la puissance vitale réside dans son souffle. Un submersible possédant en surface une flottabilité égale à près d’un tiers de son poids d’autre part, c’est un tiers de son poids d’eau qu’il doit encaisser pour plonger, soit 150 tonnes environ pour les types actuels : chiffre très supérieur à ce que pourront jamais atteindre les plombs de sécurité. Seulement, ici, le délestage n’est plus immédiat. Autrefois, il était même lent ; cela suffisait pour les besoins de la manœuvre normale ; en cas d’avarie, cela se trouvait insuffisant. Mais on a réalisé de grands progrès. La chasse est produite par l’air comprimé, qu’on lance dans les ballasts et qui en expulse l’eau. La puissance ne manque pas, mais pour aller vite, l’indispensable est d’ouvrir assez largement à l’eau qu’on chasse un orifice de sortie. On arrive maintenant à expulser 50 tonnes en une minute. Peut-être gagnera-t-on encore sur ce délai, déjà court. Souhaitons-le, car il ne correspond encore qu’à la manœuvre en surface. Or, sous dix mètres d’eau, la pression étant de 2 atmosphères au lieu d’une, la rapidité sera diminuée de moitié. A 20 mètres, elle sera réduite au tiers, à 30 mètres au quart. Il ne serait donc pas sans intérêt de prévoir des pressions d’air et des facilités de chasse permettant de lutter à ces profondeurs contre la résistance à l’expulsion.