couvent, « où d’indulgentes nonnes éduquaient, à la portugaise, des pensionnaires très jolies. »
« Leur aspect, dit le comte de Ségur, nous consola des deux redoutables grilles qui séparaient le parloir et l’intérieur du couvent. La Mère-Abbesse, suivie de sa jeune cohorte, arriva gravement derrière la grille avec le costume, la taille, la figure, que nous représentent les portraits d’abbesse du XIIIe siècle. Rien ne manquait à cette ressemblance, pas même la crosse, car elle en tenait majestueusement une à la main. Après les premiers complimens, notre encourageant Consul nous dit que, suivant l’usage portugais, nous pouvions, à la faveur des grilles, nous montrer aussi galans que nous le voudrions pour son jeune troupeau… Chacun de nous choisit donc l’objet qui frappait le plus doucement ses regards, et qui semblait répondre avec le plus d’obligeance à ses œillades. Ainsi nous parlâmes promptement d’amour… Et comme nos jeunes Portugaises nous lançaient des regards qui semblaient annoncer l’envie de renverser les grilles, nous nous crûmes obligés de répondre à ces tendres agaceries en leur envoyant des baisers, non sans crainte cependant de paraître trop téméraires à Madame l’Abbesse… Enfin, cette bonne abbesse se mêla de l’entretien, et, s’apercevant peut-être que notre joie était tant soit peu mêlée de surprise, elle nous dit, par l’entremise du Consul, que l’amour pur était fort agréable aux yeux de Dieu. « Ces jeunes personnes, ajoutait-elle, auxquelles je vous laisse offrir vos hommages, s’étant exercées à plaire, seront un jour plus aimables pour leurs maris, et celles qui se consacreront à la vie religieuse, ayant exercé la sensibilité de leur âme et la chaleur de leur imagination, aimeront bien plus tendrement la Divinité. D’une autre part, poursuivait-elle, cette galanterie jadis honorée ne peut être que fort utile à de jeunes guerriers ; elle vous inspirera l’esprit de la chevalerie : elle vous excitera à mériter par de grandes actions le cœur des belles que vous aimez et à honorer leur choix en vous couvrant de gloire. »
Ainsi parla à ces jeunes officiers français une abbesse portugaise de l’île de Terçère. Les jeunes quakeresses américaines qu’ils allaient bientôt rencontrer sur leur chemin étaient prêtes à leur tenir, sur la guerre et sur l’amour, des propos tout différens.
Le 5 septembre, comme la Gloire et l’Aigle arrivaient en