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projets de constitution à donner à l’Alsace-Lorraine. Bien que la question ait pour nous un intérêt très vif, nous continuerons d’en parler en termes discrets. Il semble que les choses tournent pour l’Alsace-Lorraine mieux qu’on ne pouvait l’espérer : cependant rien n’est fini et tout, au contraire, est remis en question,

On se rappelle la discussion qui a eu lieu au Reichstag : elle s’est terminée par la constitution d’une commission parlementaire à laquelle le projet du gouvernement a été renvoyé. On a reconnu tout de suite que les élémens favorables aux revendications de l’Alsace-Lorraine dominaient dans cette commission : les représentans du Centre et des nationaux-libéraux y ont pris une altitude plus résolue encore qu’ils ne l’avaient fait au Parlement impérial. Ils avaient bien appuyé, au Reichstag, les demandes des Alsaciens-Lorrains, mais devant l’opposition du gouvernement, opposition qui semblait alors très résolue, on pouvait redouter que la crainte de tout perdre ne les empêchât du demander davantage. Le gouvernement avait dit, en effet, que le projet qu’il présentait, d’accord avec le Bundesrath ou Conseil fédéral, était le maximum des concessions qu’il pouvait consentir, qu’il n’irait pas plus loin, qu’il refusait de faire un pas de plus : il assurait d’ailleurs que, s’il voulait le faire, le Conseil fédéral ne le suivrait pas. On sait que le Conseil fédéral, composé des représentans des divers États, est la pièce maîtresse dans l’élaboration des lois qui intéressent l’Empire. C’est dans ce Conseil que l’Alsace-Lorraine demande à entrer et à disposer de trois voix ; c’est de ce Conseil que le projet du gouvernement lui fermait brutalement la porte en lui disant qu’elle était et qu’elle resterait une terre d’Empire, propriété commune de tous les autres États au niveau desquels elle ne devait pas avoir la prétention d’être admise, du moins avant longtemps. L’Alsace-Lorraine demandait aussi un Statthalter nommé à vie ; on ne consentait à lui en donner qu’un qui serait nommé et révoqué par l’Empereur. Dans la Commission du Reichstag, les Alsaciens-Lorrains ont obtenu immédiatement gain de cause. Une majorité considérable s’est prononcée dans le sens de leurs vœux, et les représentans du Centre, en particulier, ont déclaré fermement qu’ils n’admettraient aucune transaction : ils préféraient n’obtenir rien que de ne pas obtenir tout ; c’était aussi la résolution et le langage des Alsaciens-Lorrains. En ce qui concerne le Statthalter, ils voulaient qu’il fût nommé par l’Empereur sur la proposition du Conseil fédéral, et qu’il ne pût être révoqué qu’avec le consentement de ce dernier. M. Delbrück, ministre de l’Intérieur, s’attendait sans doute à