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qu’on puisse traduire un ouvrage quelconque d’un auteur dont on ignorerait entièrement les idées maîtresses.

Pour nous, qui ingénument n’aperçûmes sur le coup, dans la réponse du président du Conseil, que le désir de s’informer mieux, plus ingénument encore nous sollicitâmes le rendez-vous par lui proposé. Nous le sollicitâmes à plusieurs reprises, je puis dire bien des fois, puisque je retrouve la trace écrite de sept de ces démarches, qui se placent par ordre chronologique : la première, celle dont il s’agit ci-dessus, le 11 novembre 1906, les autres, le 6 mars, le 4 juillet, le 11 novembre 1907 ; les 5, 8 et 26 février 1909. Toute l’année 1908 fut remplie de nos instances ; durant toute cette année, il ne s’écoula presque pas une semaine, en tout cas, pas un mois sans que nous revenions à la charge. Efforts aussi persistans que vains : à notre lettre du 4 juillet 1907, le président du Conseil répondit quand la Chambre fut partie en vacances, le 12 ou le 13 juillet ; rendons-lui pourtant ce témoignage qu’il le fit en homme à la fois pressé et poli, par un petit bleu et un autographe. Il répondit ensuite le 16 janvier 1908, en nous envoyant son sous-secrétaire d’Etat, M. Maujan, à qui nous parlâmes « de la liberté et de la sincérité du vote » et qui nous parla « de la corruption électorale ; » mais si nous lui avions parlé de la représentation proportionnelle, M. Clemenceau en eût bien ri ! Le 7 février 1909, le président du Conseil, pour clore un débat un peu trop protocolaire, mais qu’il avait lui-même provoqué, sur le point de savoir si c’était à lui de se rendre devant la Commission ou à la Commission de se rendre chez lui, voulait bien m’annoncer qu’ « il viendrait lorsqu’il pourrait porter l’avis du gouvernement, ce qui ne saurait tarder, » et il nous en renouvelait l’assurance le 2 mars en termes non moins courtois, mais non moins dilatoires. Or l’incidente de rien du tout, par où finit ce bon billet, cet engagement dégagé, cet engagement-dégagement : « ce qui ne saurait tarder » est admirable, et bien des gens qui font profession d’ « humoristes » en revendiqueraient l’honneur ! C’est admirable, à cette date, mars 1909 ; alors que mon rapport avait été repris dès le 2 juillet 1906, alors que le rapport de M. Etienne Flandin était aux mains de tous, et des ministres, par conséquent, depuis le 22 mars 1907 ; à la veille même du jour où le rapport supplémentaire de M. Varenne, remplaçant M. Flandin élu sénateur de l’Inde, allait être déposé ; à ce moment-là, M. Clemenceau en