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strophes lyriques tandis que le « moi » si inquiet des hommes du XIXe et du XXe siècle a dû faire, à l’expression du sentiment religieux, une part importante.

Il s’agira donc, dans ces pages, moins de la renaissance proprement dite de ce sentiment, que d’une résurrection de la sensation religieuse avec tout ce qu’elle peut contenir, soit de morbide, soit de très pur. Se déclarer mystique ne signifie pas, pour les disciples de Verlaine, qu’ils donnent leur assentiment à une morale quelconque, ni surtout qu’ils décident de se soumettre aux pratiques quotidiennes et humbles de cette morale. Ils ne veulent que modifier la vie dans ses aspects, l’expliquer dans ses profondeurs, la renouveler dans ses sensations. La notion de péché, si clairement définie par Verlaine, ajoute un raffinement à des expériences nouvelles. C’est surtout parce qu’elles sont défendues que les sensations atteintes apparaissent exquises. Les purs mystiques s’élevaient à l’extase par l’ardeur sublime de la prière. Les mystiques décadens et symbolistes prétendent atteindre au même résultat par d’autres moyens, par « les énervemens de l’organisme. »

Est-ce à dire que leur velléité religieuse ne soit qu’une attitude ?


II

Un désir de foi plane sur toute la fin du XIXe siècle, et, dès le début du XXe, il se précise.

Nourri de réalités mathématiques, de certitudes rationnelles, de science pure, Sully Prudhomme se montre, dans Prima Hora, joignant les mains, le front sur la Bible, essayant d’épeler son Credo. Sans doute, la délicatesse sentimentale de l’auteur des Vaines tendresses lui faisait, vers la recherche des consolations religieuses, une pente facile. Mais les mêmes préoccupations se manifestent avec éclat chez un païen aussi déterminé qu’Albert Samain. Il suffit d’une sonnerie d’église pour réveiller en lui.


… Ce qui reste de foi dans nos vieux os chrétiens…


Puis, à mesure que l’ombre de la mort descend sur sa vie, sitôt arrêtée, l’inquiétude de l’au-delà s’empare de lui, le tenaille plus violemment :