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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/889

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friperie, elles y pendront, pour ainsi dire, vides de tous les « respects » anciens ; adieu « les palais où ils jugent, les fleurs de lis, tout cet appareil auguste, qui leur était fort nécessaire ; » quand ils y rentreront, quand ils les retrouveront, quand ils les restaureront, ils auront toujours l’air de ne pas se sentir chez eux et de n’être là qu’en passans ou en intrus ; adieu « les soutanes et les mules » des médecins, « les bonnets carrés des docteurs et leurs robes trop amples de quatre parties » par quoi ils « dupaient le monde[1]. » Et le monde peut-être sera encore et toujours dupé, mais ce ne sera point par les mêmes gens, et il y faudra de nouvelles façons, parce que ce ne sera plus le même monde et qu’il y faudra tant bien que mal rétablir un nouvel ordre, — l’ordre sans les ordres, — lequel ne sera pas très facile à construire.


IV

La « réhabilitation des arts mécaniques » sera l’œuvre surtout des encyclopédistes ; mais, à cet égard encore, on peut dire qu’ils procèdent directement de François Bacon. Avant La Bruyère, en effet, avant Pascal, avant Domat, vers le même temps que Charles Loyseau, en 1620, il donnait au public l’essai qui porte pour titre : Parasceve ad hisioriam naturalem et experimentalem[2], où il distingue bien entre : 1o « les arts qui découvrent (exhibent), altèrent ou préparent les corps naturels et les matériaux des choses, » — traduction littérale, — tels que l’agriculture, la cuisine, la chimie, la teinture, les ouvrages du verre, de l’émail, du sucre, de la poudre à feu, des feux d’artifice, du papier ; et 2o « les arts qui consistent principalement dans un mouvement subtil des mains et des instruirions, comme le tissage, la forge (fabrilis) et, sous le même nom, je pense, le bâtiment, en général ; comme l’architecture, les ouvrages des meuniers, des horlogers, etc. ; » mais où il honore également tous ceux de ces arts « qui se rapportent et sont susceptibles de servir à l’institution de la philosophie, » en tant précisément

  1. Pensées, article XXVI.
  2. Ce devait être le plan et comme l’ébauche de la troisième partie projetée de l’Instauratio magna : « III. Phénomènes de l’univers (Phenomena universi) ou « Histoire naturelle et expérimentale propre à servir de base à la philosophie. » In-folio, apud Joannem Billium, 1620.