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encore, ont pour cause l’ignorance ou la légèreté de ceux qui la consultent. Le mouvement qui fait participer de nos jours à la vie politique un plus grand nombre de citoyens qu’autrefois tend à augmenter sa clientèle ; il importe que les statisticiens secondent le mouvement, et qu’en vue de la plus grande diffusion possible de leurs travaux, ils ne négligent pas un des instrumens les plus propres à en vulgariser les résultats.


V. — L’ÉCONOMISTE

C’est à un travail économique que Levasseur avait consacré son premier effort d’historien. Les recherches sur le système de Law le mettaient aux prises avec les questions de circulation fiduciaire et métallique : il a toujours manifesté pour elles une prédilection que l’on s’explique en réfléchissant que c’est là une des parties de l’économique où il est possible d’arriver à la plus grande précision, et où dès lors son esprit logique se trouvait le plus à l’aise. Il embrassait d’ailleurs avec une égale autorité l’ensemble de la science, à laquelle ses études spéciales, sa culture générale, sa connaissance des ouvrages et des théories de la plupart des économistes français et étrangers, l’avaient admirablement préparé. Dès 1868, il publiait un cours d’économie rurale, industrielle et commerciale en tête duquel il inscrivait ces paroles d’une si profonde vérité :


L’économie politique est une science mal connue. Tous les hommes vivent au milieu des phénomènes qu’elle étudie et beaucoup s’imaginent pouvoir en parler d’une manière compétente au nom de leur seule expérience, sans s’être donné la peine de l’apprendre.


C’est pourquoi, dans la première partie du livre, il exposait les notions fondamentales, c’est-à-dire les principes et l’enchaînement des lois. Vingt-cinq ans plus tard, son Précis d’économie politique résumait les élémens de la production, de la distribution, de la circulation et de la consommation des richesses. Il terminait par un chapitre consacré à l’application de l’économie politique à la législation financière, dans lequel il rappelait qu’il importe de mesurer la dépense à la recette, et non la recette à la dépense, et d’attendre, pour perfectionner les services publics, une « plus-value naturelle des revenus de l’Etat. » C’est la méthode du sens commun, inverse de celle