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Un sombre emblème, et nul lien d’amour n’attache
Cet arbre sans lumière à cette fleur sans tache.
Je sais qu’au sol natal ton pas est si léger,
Quand tu traverses, grave et tendre, le verger,
Que sur l’herbe sa trace est à peine sensible.
Je sais que ta candeur hante l’Inaccessible,
Et que rien ne prévaut contre ta pureté.
Mais tout l’ample frisson du feuillage agité
D’un souffle, tout l’émoi des roses que la brise
Disperse, tout l’éclat de l’étang qui s’irise,
Toute l’agilité des oiseaux innocens
T’enveloppent à ton insu d’un vague encens,
Et l’immense Nature, ô vierge, semble faite
Pour offrir à ta grâce adorable une fête.
Or, j’oserai mêler, ce soir, si tu le veux,
À l’hommage naïf traduit en si doux vœux,
Bien que tant de vertu, pour le monde cachée,
Jamais d’un pied charnel ne puisse être approchée
Et qu’aucun bras humain ne la doive saisir,
L’écho d’une prière et l’ombre d’un désir.

SOIR PRÈS DE LA MER


Les genêts d’or frissonnent sur la lande
Où, taciturne, un pâtre vient s’asseoir.
triste Amour, combien ma peine est grande,
Ce soir !

Mes yeux soudain fondent en larmes chaudes
Ainsi qu’au temps où sa voix me parla.
O jeune Amour, est-ce donc toi qui rôdes
Par là ?

C’est toi ! c’est toi ! Bien que la vie efface
Une candeur dans l’homme chaque jour,
Ton souffle ardent me brûle encor la face,
Amour !