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On en a conclu que le grisou est incorporé dans les pores du combustible avec une pression suffisante pour faire sauter, quand elle est près de l’atmosphère extérieure, la mince cloison qui l’en sépare.

Dans le langage des mineurs, le grisou est dit aussi : brisou, mofette, mauvais air, mauvais goût, terroux, feu-grieux, feu-sauvage ; les Anglais disent : puff, fire live (feu-ardent), fire damp (feu-mofette) ; les Allemands : schlagende Wetter.

Bien qu’il y ait beaucoup de mines de houille qui ne soient point grisouteuses, on peut dire que c’est l’état ordinaire et que les différences d’une localité à l’autre sont plutôt dans la quantité variable du grisou que dans sa présence ou dans son absence. Presque toutes les houilles contiennent du grisou, et la preuve, c’est qu’on l’en retire par la distillation. Mais certaines variétés en renferment de tout formé et même en quantités considérables, et avec si peu d’adhérence qu’il s’en dégage sous la seule influence de la décompression résultant de l’ouverture des puits et des galeries.

Le gaz grisou qui nous occupe est surtout formé, comme le gaz d’éclairage, d’hydrogène bicarboné, appelé aussi méthane ou formène et plus anciennement, d’une manière plus pittoresque, gaz des marais, parce qu’il se dégage, et parfois en abondance, des contrées marécageuses. Cette composition suffit pour indiquer que le grisou est inflammable : il y a des mines où l’on a trouvé moyen de le canaliser et de l’amener ainsi jusqu’à la surface du sol, ou au fond de puits à des becs où l’on l’allume pour servir à l’éclairage et au chauffage. Elle indique aussi que, mélangé à une proportion convenable d’air, le grisou doit détoner : les explosions des mines sont dues à l’inflammation du mélange de l’air avec le gaz souterrain.

On a comparé la houille imprégnée de gaz à une éponge mouillée, c’est-à-dire imprégnée d’eau : le front de taille correspond à la surface par laquelle l’éponge se dessèche spontanément ; dans les deux cas, la quantité de matière d’imprégnation va en diminuant de la surface de dégagement vers les zones internes qui peuvent être uniformément pourvues.

L’exhalaison spontanée du grisou charge petit à petit l’atmosphère des travaux de substance carburée ; et, au bout d’un temps plus ou moins long, cette atmosphère deviendrait explosive et en même temps irrespirable. On s’est donc depuis bien