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beaucoup les durées historiques : tandis que, dans les profondeurs moyennes de l’amas combustible, on trouve des débris provenant des générations humaines qui nous ont immédiatement précédés, des médailles et des armes gauloises, des briques à rebord, les ruines d’une voie romaine, comme aux Ponts, en Suisse. A une profondeur plus grande, se présentent les armes et des outils de pierre préhistoriques associés à des ossemens fossilisés de mammouth et d’autres animaux qui n’existent plus, comme le Megaceros, ce cerf à bois gigantesque des tourbières de l’Irlande. Dans ce cas, la tourbe du fond a des caractères spéciaux, par suite de l’énorme durée de la macération qui dépasse des centaines de siècles ; par suite aussi de la pression que lui ont infligée les masses superposées. Elle s’est ainsi dépouillée de la structure moussue qu’elle avait d’abord, et elle a acquis une compacité et une nuance noire qui en font déjà un charbon.

Mais il est facile de s’imaginer son avenir par la rencontre de gisemens plus anciens. Par exemple, il existe dans le terrain secondaire supérieur des Bouches-du-Rhône, à Fuveau, un dépôt de lignites, d’une épaisseur de plus de cent mètres et d’exploitation très profitable. C’est cependant un charbon de qualité relativement médiocre, ne dégageant, à la tonne brûlée, qu’une quantité de chaleur inférieure à celle des bonnes houilles. Il représente un produit plus éloigné que la tourbe de la composition du bois ; c’est-à-dire que, pour le ramener à l’état de celui-ci, il faudrait, si la chose était pratiquement possible, lui incorporer les élémens du grisou en plus grande proportion qu’il n’était nécessaire de le faire dans le cas de la tourbe. La différence est évidemment relative à la durée et à la profondeur plus grandes de l’enfouissement, comme si une certaine opération chimique, toujours la même, avait accumulé ses résultats en plus grande proportion.

Allons plus loin et arrêtons-nous un instant au Tonkin, dans l’île de Kebao, concédée par le gouvernement à Jean Dupuis et où, en commençant l’exploitation, on avait cru trouver de la houille. On dut bien reconnaître l’erreur, quand il fallut, pour faire des briquettes utilisables par la marine militaire, y mélanger un poids égal de houille véritable, à prendre au plus près au Japon. C’est toutefois un combustible plus perfectionné que celui de Fuveau, étant plus ancien, puisqu’il est