Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 5.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ils travaillent sans bruit ; ce sont ces serviteurs modèles que la République doit rechercher pour le haut commandement ; ils ne trahiront pas la confiance mise en eux, même si leurs traditions de famille ne leur permettent pas d’admirer sans réserve toutes nos institutions. Ils servent la Patrie et n’oublieront pas que la France est représentée par le Gouvernement qu’elle s’est volontairement donné et qu’ils respectent. Appelés dans un Conseil, ces officiers n’hésiteront pas à donner leur opinion, fût-elle contraire à celle des puissans du jour ; mais, dans l’exécution, ils obéiront ponctuellement et sans réserve, car ils sont guidés par le sentiment du devoir ; ils pourront être ardens et indépendans dans les discussions ; ils seront toujours fidèles dans l’action.

Il y eut malheureusement des époques récentes où des ministres se sont laissés hypnotiser par des officiers politiciens et les ont appelés à de hautes situations, malgré leur incapacité notoire. Il nous faut, disaient-ils, une armée républicaine. Il convient de préciser ce que doit être l’armée française aujourd’hui. Tous les hommes valides de la nation sont appelés dans l’armée qui est, suivant une juste expression, la Nation armée. Dès lors, au point de vue politique, elle doit renfermer en son sein, et dans tous les grades, toutes les opinions, et à peu près dans la même proportion que dans le pays entier. Aujourd’hui, il est indiscutable que la nation est républicaine, l’armée l’est certainement aussi ; cette conception d’une armée républicaine est justifiée à tous égards. Mais certains sectaires en ont une toute différente ; pour eux, l’armée doit bien comprendre tous les citoyens, le service militaire étant une charge commune à tous ; mais ils voudraient interdire l’accès des grades élevés à tous les hommes qui n’ont pas leurs idées politiques ; ils cherchent, et malheureusement ils arrivent parfois, à faire porter au commandement des grandes unités des officiers qui font parade de sentimens politiques exagérés et le plus souvent faux, et à en écarter d’autres de la plus haute valeur. Il y a là un vrai danger pour l’armée qui risque ainsi d’être médiocrement commandée, un vrai danger pour la République, que nous voulons forte et durable, et qui peut être à la merci d’ambitieux sans scrupules.

La vertu militaire la plus indispensable à celui qui commande, c’est la grandeur, la noblesse du caractère ; le caractère