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reste supérieure à celle qui lui était faite il y a trente ans. Les salaires, en effet, se sont élevés, et, d’autre part, le niveau moyen des cours actuels ne dépasse pas celui que l’on constatait vers 1875 ou 1880. L’ouvrier ne perd donc nullement le bénéfice de l’augmentation de son salaire nominal. Il est simplement contraint de renoncer aux avantages imprévus que lui assurait la baisse des denrées alimentaires durant la période prolongée dont nous venons de sortir, et que la dépression des cours a caractérisée.

Il y a plus. Le public paraît oublier que la cherté relative des vivres, depuis quelques années, n’a pas affecté la situation de tous les salariés. Un très grand nombre d’employés sont, en effet, nourris par leurs patrons. Ces derniers seuls supportent donc les conséquences du renchérissement des denrées alimentaires. Cette observation ne s’applique pas seulement aux « gens de maison ; » elle reste exacte pour tous les salariés des deux sexes qui travaillent avec leurs patrons, petits commerçans, petits industriels ou artisans. Dans les campagnes notamment, tous les domestiques sont nourris et logés à la ferme. Les tâcherons eux-mêmes reçoivent parfois un repas sur deux. Les répercussions sociales de la hausse sont ainsi atténuées.

Enfin l’étude du passé prouve que l’élévation du prix des denrées agricoles est toujours suivie d’une augmentation des salaires.

Nous venons de voir, cependant, que la hausse pouvait imposer des sacrifices et par suite des souffrances à certaines catégories de consommateurs qui paraissent plus spécialement intéressans.

Il est clair qu’à ces sacrifices correspondent des avantages équivalens dont bénéficient les producteurs agricoles, les entrepreneurs de culture, chefs d’industrie à titre de propriétaires-cultivateurs, de fermiers ou de métayers. La hausse des denrées agricoles a pour conséquence immédiate l’élévation parallèle du montant des recettes, et, d’autre part, les profits culturaux augmentent. Rien de plus facile, et en même temps rien de plus instructif que de montrer avec quelle précision se produisent ces répercussions si importantes au point de vue social.

Le produit brut d’une exploitation rurale est représenté par la valeur de tous les produits vendus annuellement d’une façon régulière et normale. Ce produit exprimé en francs est égal aux