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au contraire, parlé cent fois des souffrances, de la décadence et de la ruine prochaine de notre industrie rurale lorsque les prix baissaient, depuis 1880 jusqu’à 1900 !

On dit encore : « La population augmente ; les besoins grandissent, les exigences de la consommation sont incessantes. La hausse est la conséquence de. ce phénomène démographique. »

Nous sommes persuadés en effet, que la population augmente, — ailleurs qu’en France, — et il est fort naturel d’admettre que ce développement contribue à soutenir le niveau des cours. Mais ceux-ci baissaient il y a trente ans, alors que la population des grands pays civilisés s’élevait, et s’élevait même plus rapidement encore qu’aujourd’hui, car la natalité fléchit partout où la richesse grandit. Le développement de cette richesse générale, et de la production agricole plus spécialement, suffit d’ailleurs aux exigences de la consommation. Les statisticiens du bureau de l’Agriculture à Washington[1] ont posé ce problème et soutiennent qu’ils l’ont résolu en prouvant que la production, par tête d’habitant, n’a jamais été plus considérable. La hausse, nous l’avons montré, est cependant tout aussi marquée dans l’Amérique du Nord qu’en France et qu’en Europe !

On a parlé encore fort judicieusement d’une véritable transformation résultant de la hausse des salaires et de l’application des lois sociales. Le pouvoir d’achat des classes ouvrières aurait augmenté et la hausse serait la conséquence de l’intensité nouvelle des demandes. Le temps nous manque pour discuter cette opinion, mais ce que nous venons de dire à propos du développement de la production aux États-Unis prouve déjà que l’accroissement de la demande des produits agricoles est compensé par l’augmentation de la production.

L’explication que l’on nous propose ne saurait d’ailleurs être acceptée en ce qui louche les hausses incontestables que l’on a observées autrefois et qui n’ont pas été moins notables que celle dont on parle aujourd’hui.

En vérité, nous pensons qu’il faut chercher ailleurs une cause générale dont l’action s’ajoute à l’influence des autres faits économiques. Cette cause est, pour nous, — comme pour bien d’autres, — la dépréciation des métaux monétaires. Assurément

  1. Voyez le Crop Reporter, n° de janvier et mars 1911