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nous ne prétendons pas que cette cause agit seule ; nous ne songeons pas davantage à lui assigner une importance déterminée et précise. Mais il importe, croyons-nous, de ne pas écarter cette hypothèse, la seule qui explique, — à défaut d’autres raisons suffisantes, — la hausse des prix durant de longues périodes.

Le mécanisme même des répercussions monétaires sur les cours n’est point mystérieux. Le prix des marchandises et des services est représenté par un poids déterminé de métal précieux, et exclusivement, à cette heure, par un poids d’or. Si la récolte de l’or augmente, il est vraisemblable que son pouvoir d’achat diminue, surtout si l’accroissement de cette production métallique est rapide, parce que la masse disponible dépasse alors les besoins ordinaires de la circulation ou des dépôts dans les grandes banques. La diminution du pouvoir d’achat de l’or correspond à la hausse, puisqu’il faut donner plus de métal, — en moyenne, — quand on veut acquérir la même quantité de marchandises.

Nous constatons, — et cela est une certitude, — que l’abondance relative des métaux précieux a toujours coïncidé depuis cent cinquante ans avec la hausse du prix des denrées agricoles, soit à la fin du XVIIIe siècle, soit après 1850 jusqu’en 1875.

Cette coïncidence est curieuse et suggestive ; elle permet d’admettre qu’il existe une relation, un rapport de cause à effet entre l’afflux des métaux précieux et l’élévation des cours.

On observe, au contraire, — et c’est là une sorte de contre-épreuve, — que les baisses prolongées des cours, de 1815 à 1850, de 1875 à 1900, ont coïncidé avec une diminution de la production des métaux précieux, diminution qui aurait produit comme conséquence une rareté relative, car les exigences de la circulation et des échanges auraient continué de croître au moment où l’instrument métallique d’échange était produit moins abondamment. Nous accueillons cette hypothèse, vraisemblable et intéressante, parce qu’elle explique, seule, des faits que les autres causes signalées expliquent mal ou n’expliquent pas !

Depuis 1890, c’est-à-dire depuis vingt ans, il est certain que l’or est beaucoup plus abondant. Sa production dans le monde ne dépassait pas 169 000 kilogrammes, de 1886 à 1890. Depuis 1906, elle est supérieure à 600 000 kilogrammes. Elle a donc triplé. Ce fait n’a-t-il aucune importance ? Il nous paraît impossible