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fait déjà justice de toutes les attaques excessives et dangereuses dont le commerçant est l’objet.

Il ajoute ensuite avec beaucoup de finesse et de bon sens :

« Il n’y a qu’un moyen de calmer la foule ignorante, c’est de lui permettre de contrôler les profits du producteur et des intermédiaires. »

Nous sommes persuadés, en effet, que les coopératives permettront, dans maintes circonstances, de montrer combien les profits du commerçant ont été exagérés par les légendes populaires.

Si ces bénéfices peuvent, d’ailleurs, être réduits par la concurrence loyale et légitime des consommateurs associés, personne ne saurait regretter ce résultat. Tout le monde a le droit de profiter de la liberté et de la concurrence.

Quant aux attaques si souvent renouvelées contre le commerçant et l’industriel, il importe d’en faire justice. Le négociant achète au meilleur marché possible et revend le plus cher qu’il peut. En cela, d’ailleurs, il agit au mieux de ses intérêts sans sacrifier le moins du monde l’intérêt de la société. C’est le commerce qui, en achetant le blé ou le bétail dans les lieux où ils abondent pour les transporter et les revendre dans les lieux où ils font défaut, abrège la durée des crises de subsistances, en atténue les effets, soutient les prix et proportionne partout, avec me précision rigoureuse, les approvisionnemens aux besoins de la consommation. Acheter au meilleur marché et revendre le plus cher possible, c’est tout le secret du commerce. Or il se trouve que c’est là une mission sociale de grande importance, surtout durant une période de hausse, puisque les opérations du commerce tournent en dernière analyse au bien général, et ne servent pas moins les intérêts de la consommation que ceux de l’agriculture. En achetant dans le pays où la denrée abonde, le commerçant y fait monter les prix. En revendant ensuite sur un marché où la denrée est rare et où les prix sont nécessairement élevés, il fait la baisse. Chacune de ces deux opérations est utile : l’achat en désencombrant un marché trop plein et en relevant les prix trop faibles, la revente en approvisionnant un marché trop dégarni et en abaissant les prix trop forts.

Pour produire tous ses effets, ou plutôt tous ses bienfaits, il n’est pas nécessaire que le commerce ait pris livraison d’un