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POÉSIES

À LA CÔTE D’ÉMERAUDE


SOUVENIR DES BORDS DE LA RANCE


Je revois ce printemps, cette aube, ce soleil,
Les châtaigniers en fleurs, l’abeille qui s’y pose,
La chapelle que baigne une lumière rose,
La ronce mûrissant son fruit bientôt vermeil.

Je revois la colline où vécut ma jeunesse,
Et j’entends des baisers dans un écho lointain.
Et les coups de la rame et la cloche, au matin.
Alors que tout palpite et vibre en saine ivresse.

A l’ombre du grand saule, en un beau jour de mai.
Assis l’un près de l’autre au bord de notre Rance,
Regardant le flot pur vert comme l’espérance,
Pour la première fois, ô délices, j’aimai !

L’alouette éperdue exhalait sa tendresse
Et mon cœur épanchait son juvénile amour.
L’hirondelle volait, heureuse du retour.
Et le pays natal fêtait son allégresse.