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exécuter que des ordres formels et précis, comment peut-on espérer qu’à la guerre, peut-être sur le tard de la vie, à la tête d’un commandement important, il sache penser, réfléchir, apprécier une situation et agir de son propre mouvement ?

C’est donc dans les exercices, dans les manœuvres du temps de paix qu’il faut constamment solliciter le jugement des officiers et les pousser à agir suivant leurs pensées. Hélas ! on voit encore trop souvent des directeurs de manœuvre qui, après avoir donné le thème d’une opération tactique, exigent qu’elle se déroule exactement comme ils en conçoivent l’exécution. On les voit, courant sur le terrain, harcelant leurs subordonnés jusqu’à ce qu’ils soient entrés dans le moule qu’ils ont imaginé. Mais c’est le contraire qu’il faut faire ; une fois le thème posé, le rôle du directeur de la manœuvre est de laisser faire, de pousser à faire ; il doit réserver toutes ses sévérités pour ceux qui ne font rien. C’est après la manœuvre qu’il doit faire ses observations, après avoir entendu et pesé, avec grand soin, les raisons de chacun des acteurs.

Le général Cardot a écrit sur ce sujet de bien belles pages dans son livre de la Doctrine et la Méthode. Les officiers qui seront élevés à l’école qu’il préconise auront naturellement de l’initiative et, quel que soit leur grade à la guerre, ils sauront la montrer.


Les événemens qui se sont déroulés à Metz au mois d’août 1870 ont eu une si grande et si désastreuse influence sur les résultats de la guerre, qu’il est utile et intéressant d’en discerner autant que possible les causes. Et d’abord, pourquoi ces événemens se sont-ils passés à Metz ? Évidemment parce que Metz était une place forte. Après la défaite de Spicheren, le 6 août, les 2e, 3e et 4e corps battent en retraite dans la direction de Metz ; on songe un instant à les arrêter et à résister sur la Nied française, mais cette idée est bientôt abandonnée et les trois corps reçoivent l’ordre de se rendre à Metz où se trouvait déjà le corps de la Garde. En même temps on dirige, par voie ferrée sur cette ville, le 6e corps qui vient d’être formé au camp de Châlons. Il n’est donc pas encore question à ce moment d’une retraite sur la Meuse, en vue d’une jonction ultérieure avec l’armée de Mac Mahon qui, après la défaite de Freschwiller, s’est portée sur la Moselle